<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Mayotte : deux gendarmes relaxés après dix ans de procédure

Photo : Un "kwassa kwassa", embarcation typique utilisée par les passeurs de clandestins et de stupéfiants pour rejoindre Mayotte. (Illustration - Ikissai/WikimediaCommons)

7 septembre 2021 | Vie des personnels

Temps de lecture : 3 minutes

Mayotte : deux gendarmes relaxés après dix ans de procédure

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Leur combat judiciaire semblait interminable et voué à l'échec. Deux gendarmes accusés de trafic de stupéfiants se sont finalement vus réhabilités, il y a quelques jours, en obtenant du tribunal judiciaire de Mamoudzou, la relaxe dans un dossier qui les hantait depuis plus de dix ans.

L'affaire commence début 2011. À cette époque, le capitaine Gérard Gautier est à la tête du groupe d'intervention régional (GIR) de Mayotte, une unité qui regroupe gendarmes, policiers, douaniers et agents des impôts. Avec un second militaire, Christophe Le Mignant, gendarme maritime, ils montent une opération visant à arrêter des passeurs de drogue et de clandestins sur la base de renseignements fournis par un indicateur. En février, les limiers tendent donc leur filet et interceptent deux "kwassa kwassa", des embarcations légères utilisées par les trafiquants. À leur bord, un passeur et des clandestins venus des Comores, qui tentaient de rejoindre le territoire français. Mais également un dealer et 22 kilos de "bangué", le cannabis local.

Les trafiquants accusent les gendarmes

Après la prise, quelques semaines passent. Mais l'enquête, dirigée par un juge d'instruction local, Hakim Karki, prend un tout autre tournant quand les membres de la filière clandestine accusent les deux gendarmes d'avoir orchestré cette saisie, en contrepartie, d'après le site Zinfo974, de la promesse d'obtention de titres de séjour. Une version à laquelle le magistrat accorde du crédit, lui qui menait également une instruction à charge dans une autre affaire impliquant le GIR: le décès d'une jeune femme, des suites d'une overdose. L'unité est ainsi parallèlement accusée d'avoir fourni l'héroïne responsable de la mort de la jeune femme. Une affirmation toutefois vivement démentie par l'officier, plusieurs fois entendu depuis.

L'acharnement judiciaire d'un juge contesté

Le juge Karki aurait ainsi saisi l'occasion de mettre en lumière les méthodes particulières du Groupe, évoquant la thèse du trafic de drogue et d'une opération menée pour gonfler les statistiques de l'unité. Les deux gendarmes étaient alors mis en examen, accusés d'avoir aidé l'arrivée sur le territoire français de clandestins et de stupéfiants. En découle une procédure qui s'étale dans le temps et s'enlise, y compris au niveau des structures judiciaires, au sein desquelles les magistrats s'opposent, et confrontent des points de vues très différents les uns des autres. Dix années au cours desquelles les deux gendarmes seront placés en examen à plusieurs reprises, puis libérés. Dix années éprouvantes également. Le juge Karki sera d'ailleurs finalement écarté de l'affaire, lui-même confronté à des accusations de viol. Le premier chef d'inculpation contre les gendarmes du GIR sera par ailleurs abandonné.

Rebond inattendu

Le procès qui s'est ouvert le 1er septembre dernier au tribunal judiciaire de Mamoudzou devait donc mettre un terme à cette affaire. Arrivé à l'audience persuadé d'être condamné, comme il l'a raconté à Clicanoo, l'officier désormais à la retraite – qui vit près de Rennes – a néanmoins assisté avec sa défense à un retournement inattendu. Le parquet a en effet décidé de plaider la relaxe des deux gendarmes, dont un est encore en activité. “Ce n’est pas à vous de prouver votre innocence, a précisé le procureur au cours de l'audience, c’est au parquet d’apporter les preuves d’une culpabilité” rapporte MayotteHebdo. Une réquisition suivie par le tribunal. Soulagement pour les deux gendarmes qui retrouvent ainsi leur honneur, après avoir vécu tout au long de l'instruction un véritable cauchemar, y compris sur le plan personnel.

Abdou Chafi Allaoui, la tête du réseau en provenance des Comores, a quant à lui écopé de 18 mois de prison ferme. Une peine à laquelle s'ajoutent cinq années d'interdiction du territoire français. Cinq autres prévenus impliqués dans ce réseau de passeurs de clandestins et de produits stupéfiants sont également condamnés à des peines de deux à six mois de prison avec sursis.

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