Les magistrates chargées des investigations sur la mort, en juillet 2016, d'Adama Traoré, érigée en symbole des violences et du racisme dont sont accusées les forces de l'ordre, ont prononcé vendredi 1er septembre 2023 un non-lieu pour les gendarmes qui l'ont interpellé.
Dans un communiqué à l'AFP, Mes Rodolphe Bosselut, Sandra Chirac-Kollarik et Pascal Rouiller, qui défendent les trois gendarmes impliqués dans l'arrestation, ont salué une décision "logique et conforme à la réalité" quant au "caractère légitime et proportionné de l'interpellation d'Adama Traoré". "Empreints de dignité et de décence, nos clients, qui n'ont jamais perdu la foi dans leur engagement, saluent cette réhabilitation tant attendue et méritée", ajoutent-ils. De fait, ce non-lieu était attendu: les trois gendarmes n'ont jamais été mis en examen, mais seulement placés sous le statut de témoin assisté.
La fin d'une enquête houleuse
Cette décision met un terme provisoire à une enquête houleuse centrée sur des expertises médicales contradictoires. Provisoire, car Me Yassine Bouzrou –qui défend la famille du jeune homme noir, mort à 24 ans, et qui dénonce de longue date la conduite de l'enquête– a indiqué sur Instagram qu'il faisait appel de cette décision. "Cette ordonnance de non-lieu qui contient des contradictions, des incohérences et de graves violations du droit déshonore l'institution judiciaire", d'après lui.
L'objectif en faisant appel de cette ordonnance est, selon l'avocat, que la cour d'appel de Paris "puisse appliquer le droit dans cette affaire en renvoyant les gendarmes devant une juridiction de jugement où un débat contradictoire pourra dire si les violences ayant causé la mort d'Adama Traoré étaient ou non proportionnées et nécessaires".
Une affaire érigée en symbole
Adama Traoré est mort le 19 juillet 2016 dans la caserne de Persan, près de deux heures après son arrestation dans sa ville de Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise) au terme d'une course-poursuite, un jour de canicule où la température avait frôlé les 37°C. Il avait été interpellé lors d'une opération qui visait son frère Bagui, suspecté d'extorsion de fonds.
Pendant toute la durée de l'enquête, de très nombreuses expertises médicales et contre-expertises ont été menées. La dernière en date, rendue publique en août 2022, avait confirmé qu'Adama Traoré avait été victime d'un coup de chaleur avant son interpellation.
Comme pour Nahel M., tué à Nanterre le 27 juin par un tir policier, l'annonce de sa mort avait suscité plusieurs nuits de violences dans la petite ville de Beaumont-sur-Oise et dans les communes voisines, d'une intensité toutefois nettement moindre.
Depuis, emmenés par sa grande soeur Assa Traoré, les proches du jeune homme accusent les militaires d'avoir causé sa mort et ont fait de son décès un symbole des violences policières et du racisme.
(Avec l'AFP)