L’insécurité « alarmante et multiforme » dans les départements et régions d’outre-mer nécessite un « choc régalien » passant par la densification des forces de sécurité et un renforcement de la justice, préconise un rapport de la Délégation sénatoriale aux outre-mer présenté jeudi 23 janvier 2025.
Au terme d’une année de mission et de la visite de sept territoires, Philippe Bas (LR) et Victorin Lurel (socialistes), co-rapporteurs de ce rapport, dressent le constat d’une « insécurité alarmante et multiforme dans la quasi-totalité des départements et régions d’outre-mer ».
La moitié des agressions de gendarmes se déroulent outre-mer
Les statistiques des crimes et délits sont en effet en forte hausse depuis dix ans. Et la tendance s’accélère, s’inquiètent les sénateurs. Ils évoquent par exemple une hausse des homicides de 14% et de l’usage de stupéfiants de 37% entre 2022 et 2023. Ainsi, alors que les outre-mer ne représentent que 4% de la population française en zone Gendarmerie, ces territoires représentent 25% des atteintes aux personnes et 30% des homicides ou tentatives d’homicides auxquels ont affaire les gendarmes. Par ailleurs, 50% des vols à main armée, 25% des atteintes aux personnes, 50% des agressions envers les gendarmes s’y déroulent.
Le rapport s’alarme aussi de l’influence des narcotrafics, qui ont fait des outre-mer des « zones de transit ou de rebond », et de la porosité des frontières françaises. D’ailleurs, 50% des saisies de cocaïne ont été effectuées dans les Antilles-Guyane, liste le rapport.
Le sénateur Philippe Bas insiste également, au micro de Public Sénat, sur le fait qu’« une partie de cette violence ultramarine est une violence importée avec, pendant de nombreuses années, une immigration hors de contrôle« .
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S’adapter aux spécificités ultramarines
« L’Etat n’est pas resté inerte. Les moyens en gendarmes, en policiers, en magistrats ont augmenté, mais il n’y en a pas suffisamment », a déclaré durant une conférence de presse jeudi Philippe Bas, voulant aussi un « réexamen de l’ensemble de la procédure pénale » pour s’adapter aux spécificités ultramarines.
La première priorité est de « s’attaquer à la délinquance du quotidien », estime le rapport, qui fait 38 recommandations. Les premières visent à densifier l’implantation territoriale des forces de sécurité, et à renforcer le nombre d’enquêteurs et de magistrats en outre-mer. Concernant l’immigration clandestine, spécifiquement à Mayotte où elle est « hors norme », « avec plus 50% de la population d’origine immigrée », et « submerge le territoire », le rapport préconise la mise en place d’un « rideau de fer vis-à-vis des Comores », avec l’engagement de « tous les moyens nécessaires » et le déploiement d’un « système global modernisé de détection et de surveillance (radars, drones, surveillance aérienne, caméras longue portée…) », associé à davantage de moyens nautiques. La Guyane, n’est pas en reste avec, toujours selon de sénateur Bas, « sans doute plus du tiers de la population immigrée ».
Vers l’activation de la Défense opérationnelle du territoire (DOT)
Le rapport appelle aussi à une véritable « diplomatie française des outre-mer« en renforçant la coopération régionale. Il souhaite aussi durcir l’emploi des forces armées, notamment contre l’orpaillage illégal en Guyane, en activant le dispositif de Défense opérationnelle du territoire (DOT). Par ailleurs, les sénateurs proposent d’étendre aux Antilles les contrôles aéroportuaires à 100% (contrôles systématiques des voyageurs, NDLR), déjà en place en Guyane dans le cadre de la lutte contre le trafic de drogue.
La Guyane et les Antilles figurent parmi les régions comptant le plus d’homicides par habitants, selon le ministère de l’Intérieur. Rien qu’en Guadeloupe et à Saint-Martin, six homicides ont été recensés depuis le début de l’année, selon le procureur général de Basse-Terre, Eric Maurel.
LP (avec l’AFP)