« C’est un beau moment de ma carrière ». À Pabu, le commandant de la compagnie de gendarmerie de Guingamp, Jean-Baptiste Gautier, est celui qui a annoncé « l’heureuse nouvelle » à la famille de Morgane, une adolescente de 13 ans, retrouvée « saine et sauve » mardi 10 décembre dans la Manche, deux semaines après sa disparition.« C’est aussi beaucoup de soulagement, parce qu’on a beaucoup travaillé pour la retrouver », a ajouté le chef d’escadron.
La Gendarmerie avait ainsi mis en place une cellule d’enquête, pilotée par la section de recherches (SR) de Rennes (Ille-et-Vilaine). « Pendant deux semaines, pas moins de 70 gendarmes ont été engagés quotidiennement, dont 22 uniquement dédiés au volet judiciaire », a précisé l’Institution. « Les militaires de la Gendarmerie ont conduit plus de 110 auditions et ont réalisé un porte-à-porte qui leur a permis de rencontrer 700 personnes ».
Lors de sa découverte, Morgane, ne présentait « aucune lésion » a fait savoir mercredi 11 décembre le procureur de Saint-Brieuc. Il a ensuite révélé que l’homme de 21 ans qui avait hébergé l’adolescente était déjà poursuivi pour « soustraction » d’une mineure de 14 ans.
Le suspect, toujours en garde à vue mercredi, sera vraisemblablement présenté jeudi devant le juge d’instruction. Le procureur de la République de Saint-Brieuc Nicolas Heitz a annoncé en conférence de presse qu’il demandera son placement en détention provisoire pour éviter tout « risque de réitération ». Cet employé de bijouterie originaire de l’Ille-et-Vilaine, au parcours personnel et scolaire « complexe », « devait comparaître ce (mercredi) matin devant le tribunal correctionnel de Beauvais » pour « soustraction de mineure » sur une adolescente de 14 ans de l’Oise en avril 2024, a précisé M. Heitz.
Une dispute autour de l’usage des réseaux sociaux
Le jeune homme avait rencontré Morgane sur le réseau social Snapchat trois mois auparavant, selon ses déclarations au magistrat. Elle l’avait ensuite contacté le dimanche 24 novembre, lui faisant part d’une altercation avec ses parents et « d’intentions suicidaires ».
L’élève de 4e s’était en effet disputée avec ses parents au sujet de son usage des réseaux sociaux. Son père avait alors cassé son téléphone et confisqué sa carte SIM. Tôt le lendemain, le suspect prenait la route vers Pabu, dans les Côtes-d’Armor, pour se rendre à l’adresse indiquée par l’adolescente, qui montait dans sa voiture en lui demandant de partir.
Il l’a alors conduite dans sa chambre du foyer de jeunes travailleurs (FJT), en périphérie de Coutances. Les gendarmes l’ont finalement retrouvé mardi dans cette ville de la Manche, à quelque 200km de sa commune d’origine. Le procureur a fait savoir que le gardé à vue et Morgane ont tous deux nié avoir eu une relation sexuelle.
Par ailleurs, « un examen cutané ne laissait apparaître aucune lésion, tout comme l’examen gynécologique. Aucune blessure n’était donc matérialisée sur elle », a souligné le procureur. Des prélèvements permettront de « déterminer s’il y a eu, ou non, des relations intimes récentes », a précisé le procureur.
Morgane avait accès à un ordinateur connecté à Internet
Les enquêteur entendront de nouveau Morgane qui se trouve actuellement à l’hôpital. L’adolescente a dit « s’être disputée avec la personne interpellée qui lui avait porté des coups sur la tête » quand elle se serait plainte d’avoir faim et qu’il ne s’occupait pas assez d’elle, a détaillé le procureur. L’adolescente a dit ne pas pouvoir sortir de la chambre située en rez-de-chaussée. Les volets de la pièce étaient fermés et la porte fermée à clé. Néanmoins, elle pouvait se déverrouiller de l’intérieur. La collégienne avait accès à un ordinateur connecté à internet. Le suspect a expliqué avoir fait par le passé « plusieurs tentatives de suicide et avoir été hospitalisé en soins psychiatriques », a encore indiqué Nicolas Heitz.
La disparition de Morgane avait suscité une « vraie angoisse » au sein de Pabu et un important déploiement de moyens. C’est le témoignage, lundi, d’une femme résidant en Gironde qui a permis de retrouver la trace de Morgane. Le jeune homme s’était présenté chez elle dans la nuit du 7 au 8 décembre. Il s’était décrit comme un ami de son fils et « semblait souhaiter laisser la jeune fille et repartir seul ». Les parents de Morgane avaient multiplié sur Facebook les messages à l’adolescente et à d’éventuels témoins durant les recherches. Ils ont publié mercredi un remerciement à toutes les personnes qui les ont soutenus « dans ces moments très difficiles ».
Le présence de la collégienne dans ce FJT semble avoir échappé au personnel comme aux résidents. Le bâtiment « accueille des jeunes majeurs de 18 à 30 ans et quelques mineurs », explique Emmanuelle Leprovost, de la mairie de Coutances. Pourtant, « il y a une présence 24h/24, ils ne sont jamais seuls. »
(Avec AFP)