Jean Gabin, soldat au cinéma, Jean Moncorgé, soldat à la guerre

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14 juillet 2021 | Société

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Jean Gabin, soldat au cinéma, Jean Moncorgé, soldat à la guerre

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Déserteur de la Coloniale dans « Quai des brumes », meurtrier engagé dans la Légion espagnole (« La bandera »), quartier-maître en fuite (« Pour un soir ») : Jean Gabin a été un soldat de cinéma avant la guerre. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il a été aussi un soldat, un des rares acteurs à s’engager pour aller à la […]

Déserteur de la Coloniale dans « Quai des brumes », meurtrier engagé dans la Légion espagnole (« La bandera »), quartier-maître en fuite (« Pour un soir ») : Jean Gabin a été un soldat de cinéma avant la guerre.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il a été aussi un soldat, un des rares acteurs à s’engager pour aller à la « riflette » (combat) contre le IIIe Reich. D’abord dans les Forces navales françaises libres (FNFL), puis dans la prestigieuse 2 DB au sein du régiment blindé de fusiliers marins (RBFM) où il devint chef de char.

Une exposition au Musée du général Leclerc et de la Libération de Paris (jusqu’au 18 février 2018), intitulée « Jean Gabin dans la guerre» vient d’ouvrir. Elle présente 32 panneaux de photos et quelques objets (casquette et sac de marin de Gabin) retraçant la vie de l’acteur entre 1939 et 1945. Grande star de cinéma avant le conflit, Jean Moncorgé n’eut de cesse pourtant de demander à aller se battre. Il lâcha pourtant un jour : « Ce n’est pas que j’avais tellement envie d’y aller,  à la riflette … ».

« Jean Gabin ne voulait pas de passe-droit », explique à L’Essor le commissaire de l’exposition Patrick Glâtre.

Refusant de tourner dans des films financés par les Allemands, Jean Gabin quitte la France occupée en février 1941 pour les Etats-Unis. A New-York, il rencontre Marlène Dietrich avec qui il va vivre une passion pendant six ans. Jean Gabin tourne aussi, fin 1942, dans un film américain de propagande gaulliste (« L’Imposteur ») mais il cherche à tout prix à aller se battre car il ne veut pas être un « planqué ».

Jean Gabin rejoint en avril 1943 les FNFL. Il avait été mobilisé en septembre 1939 à bord d’un bateau à Cherbourg.

Les responsables civils et militaires de la France Libre aimeraient bien cantonner l’acteur à des films de propagande ou des tournées de théâtre aux armées. Têtu, Gabin obtient finalement gain de cause en janvier 1944.

Il embarque comme canonnier sur un pétrolier militaire pour traverser l’Atlantique vers Casablanca. Il est second-maître, le premier grade de la marine où l’on porte la casquette. « A son âge, près de 40 ans, Gabin ne voulait pas porter le bonnet de marine avec le pompon rouge », note Patrick Glâtre, également auteur de « Gabin-Dietrich, un couple dans la guerre » (Robert Laffont, novembre 2016).

Gabin rejoint finalement à l’été 1944, le régiment blindé de fusiliers marins, l’une des unités de la 2 DB. Dans ce régiment il sert au 2 escadron comme chef de char. Son blindé, un M10 américain, char de 30 tonnes, armé d’un canon de 76,2 mm, compte un équipage de cinq soldats (chef de char, conducteur, tireur, canonnier, aide-conducteur, aide-canonnier)-. Le char est baptisé « Souffleur II ». Peu de temps auparavant, le premier char « Souffleur » avait été détruit et deux fusiliers marins tués. « Pourtant, fait remarquer Patrick Glâtre, Gabin est claustrophobe et a peur du feu ».

Au printemps 1945, Gabin participe aux combats de la poche de Royan, puis à la campagne d’Allemagne. Terminus en mai 1945 près du Nid d’aigle d’Hitler à Berchtesgaden.

Une partie de la 2 DB, dont le RBFM, cantonne près de là. De Gaulle et Leclerc vont passer en revue la prestigieuse unité. Marlène Dietrich vient retrouver son amant. Gabin se cache, car il ne veut être qu’un soldat parmi d’autres. Lorsque des soldats de la 2 DB lui demandent des autographes, il refuse en disant « Gabin est resté à Hollywood, c’est Moncorgé qui est là ». Près de Berchtesgaden, Marlène Dietrich cherche le char de Gabin qu’elle finira par trouver sur les indications de soldats.

En juillet 1945, à 41 ans, le « plus vieux chef de char de la France Libre », comme il le dit lui-même, est démobilisé. Le second-maître Moncorgé est décoré de la Médaille militaire et de la Croix de guerre.

A Paris, il verra, depuis le balcon d’un hôtel, son char « Souffleur » défiler dans la capitale. Il refusera désormais de tourner en uniforme dans un film, repoussant même la proposition de jouer dans le célèbre « Paris brûle-t-il ? ».

Quelques jours après son décès le 15 novembre 1976, ses cendres seront dispersées en mer depuis un aviso de la Marine nationale.

PMG

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