Durant l’audition du principal suspect dans la disparition de Sihem Belouahmia, une lycéenne de 18 ans retrouvée morte jeudi 2 février 2023 vers une heure du matin, les gendarmes ont pris une décision qui a changé le cours de l’enquête. Alors que le suspect, Mahfoud H., 39 ans, avait, dans les premières heures de sa garde à vue, nié toute implication, les enquêteurs ont en effet noté en fin d’après-midi que son discours s’infléchissait et qu’il paraissait plus ouvert. Dans la nuit, lorsqu’il a demandé à s’entretenir avec son avocat, les enquêteurs de la section de recherches de Nîmes ont donc décidé de lui accorder "plusieurs heures d’entrevue, ce que ne prévoit pas le code de procédure pénale", selon Le Parisien, qui révèle ce point. En effet, selon l'article 63-4 de ce code, l'entretien d'un gardé à vue avec son avocat "ne peut excéder trente minutes". Mais les gendarmes "sentent le vent tourner et font preuve de professionnalisme", ajoute le quotidien. Cet entretien a été décisif, puisqu’à son issue, lorsque l’audition reprend, Mahfoud H. décide de passer aux aveux, mais avec une condition: "que son ex-femme et sa famille soient mises en sécurité, à l’abri de représailles".
"Il sait que sa faute n'est pas pardonnable"
"J’ai assisté un homme qui a décidé d'affronter sa lourde responsabilité dans la disparition de Sihem et faire cesser un suspense insoutenable pour ses proches en guidant les enquêteurs", a précisé son avocat, Me Jean-Marc Darrigade. "Il sait que sa faute n'est pas pardonnable, mais son silence n'aurait fait que l'aggraver".
Après avoir donné sa version des faits – il aurait "tué la jeune fille dans le cadre d'une dispute liée à leur relation amoureuse", précise la procureure de la République de Nîmes, Cécile Gensac – "iI a indiqué aux gendarmes où se trouvait le corps. Même si les investigations scientifiques devront encore confirmer formellement son identité", a précisé la magistrate. Mahfoud H. a ensuite été mis en examen et écroué.
Condamné cinq fois pour atteinte aux biens et huit fois pour des faits en lien avec la conduite d'un véhicule, selon Mme Gensac, l’homme avait notamment été condamné à 12 ans de réclusion en avril 2015 pour vol avec arme par la cour d'assises du Gard, une peine qu'il avait fini de purger en février 2021. Et il était à nouveau sous contrôle judiciaire, dans un dossier similaire pour lequel il devait à nouveau comparaître devant la même cour d'assises mercredi.
L’enlèvement contre une rançon: une fausse piste
La jeune fille "avait pour la dernière fois communiqué avec des amis aux alentours de minuit" le 25 janvier, alors qu'elle "s'apprêtait à sortir de son domicile, probablement pour rejoindre une personne de sa connaissance", avait précisé mercredi 1er février la procureure de Nîmes, en annonçant l'ouverture d'une enquête pour enlèvement et séquestration.
Les enquêteurs avaient dans un premier temps exploré la piste d'un éventuel enlèvement lié à des faits pour "obtenir des fonds". Mais ni les survols du secteur en hélicoptère, ni le recours à des chiens pisteurs, ni les perquisitions menées n'avaient permis de la retrouver.
Le suspect de féminicide en fuite dans les Alpes-Maritimes retrouvé mort
Le nombre de féminicides a augmenté de 20% en France en 2021 par rapport à l'année précédente, avec 122 femmes tuées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, contre 102 en 2020, selon un bilan publié en août 2022 par le ministère de l'Intérieur. Le bilan moins élevé de 2020, avec 102 femmes tuées contre 146 en 2019, avait été exceptionnel, sans qu'on sache quel rôle y ont joué les périodes de confinements et couvre-feu.
(Avec AFP)