Christophe Haquette est un caméléon. Policier. Militaire. Mineur. Gardien de prison. Lieutenant nazi le lundi dans un documentaire sur France 2, et héros de la Résistance le mardi sur Arte. Il sait se fondre dans le décor sans que personne ne le remarque, lâchant parfois quelques mots à l’écran. Cet homme a une vocation : acteur. "Et ce n’est pas un métier", précise-t-il d’emblée, avant de lâcher cette formule que tout le monde lui envie : "Dans la vie, je ne travaille pas, je m’amuse !"
Plusieurs vies
Alors oui, c’est vrai, "on ne me reconnaît pas forcément dans la rue, c’est plutôt rare ". En revanche, quand sa photo apparaît, son visage devient très familier. Un téléspectateur aguerri, pro de la zapette avec sa télécommande, l’identifie volontiers sans toutefois savoir son nom. Il apparaît régulièrement sur le petit écran. Le plus souvent dans des séries qui cartonnent comme Scènes de ménage, Commissaire Magellan, Les Petits Meurtres d’Agatha Christie. "Et même quelques passages dans Capitaine Marleau", complète-t-il. Comme un clin d’œil à son ancienne vie. Car avant de tenir de petits rôles dans ces séries, l’acteur a été gendarme. Et pour de vrai ! L’histoire de Christophe Haquette, c’est avant tout celle d’un homme convaincu qu’on peut vivre plusieurs vies…
Christophe Haquette en tenue de gendarme pour les besoins d'un film (crédit photo : DR)
Il enchaîne les rôles comme des rendez-vous avec son destin
Le bonheur n’attend pas. Alors, depuis toujours, l’acteur de 35 ans, originaire de Villers-en-Cauchies, près de Valenciennes, dans le nord de la France, enchaîne les rôles comme des rendez-vous avec son destin. Son premier l’amène à la caserne Gudin, de l’école de Gendarmerie de Montargis, aujourd’hui fermée. Nous sommes en 2005 et Christophe Haquette vient de décrocher son bacalauréat. L’homme rejoint l’Arme plutôt par besoin que par vocation. "J’étais attiré par le côté militaire, mais c’est tout, je ne m’étais pas imaginé gendarme avant. En revanche, je voulais un métier où je pouvais être payé tout de suite car j’en avais besoin. C’est comme ça que j’ai intégré la Gendarmerie". Pourquoi, alors, ne pas s’être tourné plutôt vers la Police ? "Tout simplement parce que je ne voulais pas travailler en région parisienne, où de nombreux policiers commencent leur carrière".
D'excellents souvenirs de son passé de gendarme
En 2006, Christophe Haquette occupe la fonction de Gendarme adjoint volontaire (GAV) au Peloton de surveillance et d’intervention de la Gendarmerie (Psig) de Boulogne-surMer, dans le Pas-de-Calais. Il y restera quatre ans. "C’était génial !" se remémore-t-il. "Je suis tombé sur une unité et un adjudant-chef en or ! Les interventions, le cadre, la mer, tout était bien. Je me souviens même qu’un jour, nous nous étions mis à la recherche d’une panthère, que nous n’avons finalement jamais trouvée. Je n’ai que de bons souvenirs !" En 2010, il met fin à son contrat pour raisons personnelles. Direction Metz et la Moselle, où il occupe durant un an un poste d’agent de sécurité dans une entreprise privée.
Sur les plateaux de tournage, Christophe Haquette, ici avec Sophie Marceau, rencontre du beau monde (crédit photo : DR)
Sa vie est digne d'un roman
La Gendarmerie reste pourtant dans un coin de sa tête, et il prépare le concours d’entrée à l’école de sous-officier (SOG) pour 2011. La suite est digne d’un feuilleton. "Le jour du concours, je devais prendre le train, mais il y a eu une tempête de neige. Aucun train n’a circulé. Et je n’ai pas pu passer les épreuves". L’acteur reste à quai. Quelques années plus tard, Christophe Haquette remerciera cette tempête de neige qui l’a empêché de se rendre à ce concours. « Mais à ce moment-là, je me demandais clairement ce que j’allais faire".
De retour dans le Nord dans la foulée de ce rendez-vous manqué, il atterrit dans les transports de marchandises. "Je fais un peu de tout, entre les livraisons et les chargements de camions". Puis, en 2017, le destin frappe une nouvelle fois à sa porte. Et par le grand plus grand des hasards. "De toute façon, ma vie, ce ne sont que des hasards", rigole-t-il. Sa carrière d’acteur, Christophe Haquette la doit au flair de son frère. "Il m’a identifié sur Facebook pour un casting. Je m’y suis rendu pour voir".
Son profil d'ancien gendarme est un atout
Son profil atypique ne passe pas inaperçu. Et le voilà avec un petit rôle de silhouette dans le film Je ne rêve que de vous, qui retrace une partie de la vie de Léon Blum avant la Seconde Guerre mondiale et durant l’Occupation. "Je joue un tout petit rôle. Je suis le gardien du fort où les prisonniers politiques sont en détention". Et il se prend au jeu. Sur place, il rencontre un metteur en scène qui lui propose d’intégrer sa troupe de théâtre.
Christophe Haquette jouera dans la prochaine série Germinal (crédit photo : DR)
Dans la vie, je ne travaille pas, je m’amuse
Christophe Haquette, acteur et ancien gendarme
Déjà une vingtaine de films et autant de séries
Christophe Haquette se partage ensuite entre les planches, les films et les séries, où il alterne les rôles de figurant et de silhouette. Il joue notamment dans De Gaulle, avec Lambert Wilson, sorti en 2020. Depuis 2017, il a ainsi enchaîné une vingtaine de films. Souvent en uniforme 2020, c’est aussi l’année de la Covid19 qui met le monde de la culture sur pause. Le théâtre s’arrête, mais les tournages continuent de s’enchaîner. Au point que la semaine de travail de Christophe Haquette se résume à un enchaînement de petits rôles. Sa présence, si discrète, est ô combien précieuse.
Christophe Haquette est en uniforme sur les tournages (crédit photo : DR)
Souvent en uniforme
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si on le retrouve souvent en uniforme à l’écran. "C’est sûr qu’en tant qu’ancien gendarme, je sais, par exemple, parfaitement menotter quelqu’un. Je n’ai pas besoin d’être formé, c’est un confort pour ceux qui travaillent autour. La rigueur, la discrétion, la patience sont également recherchées". Autant de qualités qui font écho à celles du gendarme. D’ail – leurs, la plupart du temps, il joue en uniforme. Comme un hommage constant à son premier métier. Sans oublier que "si je n’avais pas été gendarme, jamais je ne serais devenu acteur !"
F.S.