Un décret du 8 octobre 2024 publié jeudi au Journal officiel, « sur l’avis conforme du Conseil d’Etat », dispose que Sedat HOT, né le 29 juillet 1984 à Montbéliard (Doubs), est « déchu de la nationalité française« .
Selon Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme (CAT), cet homme de 40 ans a été condamné en 2020 à Paris à neuf ans d’emprisonnement, dont deux tiers de sûreté. La cour d’assises spéciale lui reprochait d’avoir animé une filière d’acheminement de combattants au profit de l’Etat islamique (EI) en Syrie, de 2014 à 2016.
Cette mesure porte à 25 le nombre de déchéances de nationalité prononcées depuis le début de 2024. Un chiffre égal au total des déchéances des quatre années précédentes.
Déchéance de nationalité après condamnation définitive
Jules Lepoutre, professeur de droit public à l’université Côte-d’Azur, explique à L’Essor que la déchéance de nationalité est toujours prononcée après une condamnation définitive par une juridiction française (cour d’assises spéciale ou 16ème chambre du tribunal correctionnel à Paris). Ce spécialiste du droit de la nationalité renvoie aux articles 25 et 25-1 du Code civil sur les motifs pour lesquels cette mesure peut être appliquée et sur les conditions de son application.
Nombre croissant de déchéances de nationalité
Un vivier s’est formé à partir du milieu des années 2010 (attentats de Charlie Hebdo et du 13 novembre 2015), avec des Français, dotés de la double nationalité. Ils ont participé à de nombreuses actions de soutien (recrutement, envois d’argent) à des groupes djihadistes en Syrie et en Irak ou ont combattu dans leurs rangs. Ce qui explique que de nombreuses condamnations, prononcées à la fin des années 2010, donnent lieu la décennie suivante à un nombre croissant de déchéances de nationalité.
Avant de prononcer la déchéance de nationalité, précise Jules Lepoutre, l’administration doit notifier son contenu à l’intéressé. Celui-ci est alors invité à communiquer à l’administration ses éléments de défense avec une date limite pour sa réponse. Le gouvernement saisit ensuite le Conseil d’Etat pour avis qu’il doit respecter. Un décret est ensuite signé par le Premier ministre et publié au Journal officiel dans la foulée.
Cinquante-sept déchéances de nationalité depuis 2015
La déchéance de la nationalité française a ainsi été prononcée à cinquante-sept reprises depuis 2015. Vingt-cinq fois depuis le début de l’année 2024, onze en 2023, six en 2022, quatre en 2021, quatre en 2020, deux en 2019 et cinq en 2015. Elle a uniquement visé des Français possédant une autre nationalité. Ceux-ci ont participé à des attentats ou des tentatives d’attentat en France, ou combattu dans les rangs de Daech (Etat islamique) ou ceux d’Al-Qaïda, ou tenté de les rejoindre, en Syrie ou en Irak, ou encore apporté un soutien logistique et financier à ces organisations terroristes.
Pierre-Marie GIRAUD