À l'approche du référendum sur l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie, prévu le 12 décembre 2021, on en sait un peu plus sur les moyens qui vont être déployés par la Gendarmerie dans le cadre de la sécurisation de ce dernier scrutin, qui pourrait conduire à "la pleine souveraineté" et donc l'indépendance du territoire ultramarin. Lors d'une audition à l'Assemblée nationale, le directeur général de la Gendarmerie, le général d'armée Christian Rodriguez, a ainsi signalé aux députés un renforcement du dispositif par rapport à celui mis en place pour les deux premiers scrutins qui ont eu lieu en 2018 et 2020.
15 escadrons et le GIGN en renfort
En temps normal, près de 850 gendarmes (500 gendarmes territoriaux et 350 mobiles qui se relaient, en général, tous les trois mois) sont présents dans l'archipel. Leur nombre va bondir, avec notamment l'arrivée de 15 escadrons de gendarmerie mobile (EGM) supplémentaires (contre 12 lors des précédents référendums de 2018 et 2020), soit un peu plus de 1.600 gendarmes. Ils auront pour mission de couvrir le territoire et "s'assurer que tout se passera bien dans les bureaux de vote où les gens se déplaceront".
S'il s'agit essentiellement de moyens dédiés au maintien de l'ordre et à la sécurisation du scrutin, des moyens spécialisés seront également mobilisés. C'est le cas par exemple du GIGN. En plus des 35 militaires de l'antenne locale (AGIGN), 75 gendarmes d'élite sont également envoyés de métropole. Près de 50 tonnes de matériels, notamment des véhicules blindés, sont d'ailleurs en cours d'acheminement.
"Tenir l'aéroport"
Outre la tenue du référendum, un autre objectif tactique a été évoqué par le directeur général pour justifier cette réévaluation du dispositif à la hausse. Celui de "tenir l'aéroport" de Nouméa. "Il y (en) aura un peu plus (de gendarmes) car on a intérêt à tenir l'aéroport si jamais il y a des troubles importants. Sans aéroport, on ne pose plus rien là-bas!" De fait, la Gendarmerie a également prévu un plan B en cas de pépin. "Si besoin, on a planifié une capacité très supérieure de montée en puissance", indique le DGGN. Il tient d'ailleurs à rassurer: "On aura les moyens de s'assurer que ça se passe bien, et de répondre si besoin".
De son côté, l'état-major des armées précise que pour le moment, "les forces armées en Nouvelle-Calédonie assurent leurs missions habituelles". C'est à dire: "garantir la souveraineté de la France et participer à la protection de la population, des intérêts nationaux, ainsi que des approches aériennes et maritimes dans le respect du droit international". Mais nul doute qu'elles pourront toutefois prêter main forte à l'occasion du référendum. "Les armées elles-mêmes se sont mises en situation de pouvoir monter en capacité en cas de besoin", confirme d'ailleurs le général Rodriguez.
Le général Marietti aux commandes
Comme nous vous le signalions il y a quelques jours, après la nomination du colonel Fabrice Spinetta à la tête du commandement de la gendarmerie (ComGend) pour la Nouvelle-Calédonie, un autre officier déjà connu sur le Caillou va faire son retour sur place. Après avoir quitté le ComGend Nouvelle-Calédonie au début de l'été 2021, le général de division Christophe Marietti va superviser les opérations dédiées au référendum.
La manœuvre est d'ampleur. Au total, et si de nouveaux besoins ne se font pas sentir d'ici-là, la Gendarmerie estime le coût global de cette opération à près de 40 millions d'euros. Une somme conséquente qui ne sera toutefois pas imputée au budget annuel de l'Arme et devrait faire l'objet d'un abondement spécial.
Le colonel Fabrice Spinetta prend la tête du commandement de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie
Des tensions déjà perceptibles et le maintien du référendum en suspens
À deux mois du référendum, des tensions se font déjà sentir en Nouvelle-Calédonie. L'issue de ce troisième scrutin est en effet décisive pour son avenir, avec comme question centrale, l'indépendance. Mais au-delà des oppositions politiques, un nouveau paramètre est récemment entré en compte. En effet, alors qu'en métropole, l'impact de la pandémie de Covid-19 diminue de jours en jours, l'archipel –relativement épargné jusqu'à cet été– se retrouve confronté à une très forte progression du nombre de cas depuis début septembre. Une situation ayant entrainé une série de mesures sanitaires, comme un confinement. Ce dernier est toutefois progressivement levé à partir d'aujourd'hui, alors que le taux d'incidence diminue sur place. Des contraintes qui ont pu exacerber les tensions, notamment de certaines familles empêchées de tenir des funérailles traditionnelles pour leurs proches décédés.
En pleine crise sanitaire, la tenue du référendum pourrait donc être remise en question. C'est en tout cas le souhait du camp indépendantiste qui, craignant une démobilisation de son électorat face au risque sanitaire, a demandé un report du scrutin. Le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, y est pour le moment opposé. Il est d'ailleurs sur place depuis la semaine dernière pour discuter avec les différentes formations politiques. Interrogé par Franceinfo, il a affirmé que "le principe, c'est que cette consultation soit maintenue", mais que "si la situation épidémique devait mettre tout cela hors de contrôle", elle pourrait être reportée à plus tard.
Sur l'ensemble de la population locale (près de 272.000 personnes, selon le dernier recensement effectué en 2020), environ 124.000 personnes disposent d'un schéma vaccinal complet. Soit un peu moins de la moitié de la population, alors que le gouvernement local a rendu la vaccination obligatoire. Conformément aux directives du Service de santé des armées (SSA), l'ensemble des gendarmes et militaires envoyés sur place l'est. Ils doivent par ailleurs respecter une période d'isolement préventive à leur arrivée à Nouméa.
LP
Vaccination obligatoire : les gendarmes devront être vaccinés pour le 15 septembre 2021