Pourquoi l’organisation du temps de travail des gendarmes est de nouveau menacée

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26 juin 2021 | Vie des personnels

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Pourquoi l’organisation du temps de travail des gendarmes est de nouveau menacée

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Le temps de travail des gendarmes pourrait bien être remis en cause après les conclusions de l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne, qui s'est penché sur le cas d'un. Février 2014. A Slovenska Bistrica, un sous-officier slovène commence sa semaine de garde de la caserne. Sept longs jours où il devra […]

Le temps de travail des gendarmes pourrait bien être remis en cause après les conclusions de l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne, qui s'est penché sur le cas d'un.

Février 2014. A Slovenska Bistrica, un sous-officier slovène commence sa semaine de garde de la caserne. Sept longs jours où il devra être en permanence joignable, H24. Mais pour son armée, le soldat travaille seulement huit heures par jour, complétées d'une indemnité d'astreinte. Sept ans plus tard, la longue garde slovène pourrait bien avoir raison de l'organisation actuelle du temps de travail de la Gendarmerie française.

Car après avoir été portée devant des juridictions slovènes, l'affaire du sous-officier slovène est arrivée devant la Cour de justice de l'Union européenne. Et ce 28 janvier 2021, l'avocat général Henrik Saugmandsgaard a rendu des conclusions qui ont certainement fait tousser dans les états-majors français. Elles annoncent en effet peut-être une future condamnation de la France sur la question du temps de travail des militaires.

Les militaires, des travailleurs comme les autres

En réponse aux questions préjudicielles de la République de Slovénie, l'avocat général est en effet très clair. Pour lui, contrairement à ce que le gouvernement français assure, les militaires sont en effet bien des travailleurs au sens de la directive sur le temps de travail. Une qualité indépendante, assure le juriste, qu'ils soient liés aux forces armées par contrat ou qu'ils aient le statut de fonctionnaires.

Résultat? Pour l'avocat général, les États-membres de l'Union européenne ne peuvent exclure en permanence tous les militaires du bénéfice des directives sur le temps de travail. Une pierre dans le jardin d'Emmanuel Macron. Le président avait expliqué en 2017 qu'il comptait bien que les Armées et la Gendarmerie ne soient pas concernées par la directive européenne du temps de travail.

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Question des activités spécifiques

L'avocat général danois estime cependant que cette directive ne saurait s'appliquer pour plusieurs activités des militaires. Il s'agirait par exemple des activités liées tout d'abord aux opérations militaires. Que ce soit à l'étranger ou sur le sol national. Mais aussi la formation, l'entraînement et les exercices. Cela pourrait être également le cas des activités liées à la gestion des catastrophes naturelles ou technologiques. Ou encore lors d'attentats ou d'accidents majeurs.

"Les États-membres devraient pouvoir définir, dans leur droit national, d’autres activités des forces armées exclues des règles des directives" sur le temps de travail, "pour autant que ces activités soient spécifiques et qu’ils démontrent que cela est strictement nécessaire à la bonne marche des activités en question", avertit le juriste. En tout état de cause, rappelle l'avocat général, l'activité de garde des installations militaires ne fait pas partie de ces activités spécifiques.

Les réactions des gendarmes

Des conclusions regardées de près par les gendarmes. "Ce n’est donc plus qu’une question de temps pour que le droit soit appliqué", a commenté l'association Eunomie., regrette de son côté Gendarmes et citoyens sur sa page Facebook. Pourtant lorsqu’on intègre les armées c’est pour être différent, avec une vision différente de l’engagement, même au quotidien."

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L'Arme avait revu son organisation sur le temps de travail en 2016. Ce sous la pression de l'association GendXXI, qui jugeait illégale l'instruction 1.000 sur le temps d'activité. Finalement, la Gendarmerie s'était adaptée en publiant l’instruction provisoire de juin 2016. Celle-ci introduit la notion de temps de travail effectif et porte à 11 heures consécutives le droit au repos physiologique journalier.

Une adaptation bancale pour la Cour des comptes. Dans un rapport de 2018, elle remarquait que l'Arme "reste soumise à l’obligation de transposition de la directive de 2003 dans son ensemble". "L’organisation adoptée en juin 2016, présentée comme transitoire et qui a encore un caractère incomplet, se prolonge et expose l’État à de nouveaux risques de recours contentieux“, avertissaient les magistrats financiers.

A contrario, le commandement avait alerté à plusieurs reprises sur les conséquences de cette évolution. L'ancien patron des gendarmes avait ainsi estimé que la transposition de la directive européenne sur le temps de travail avait dégradé de 6% sa capacité opérationnelle. Une inquiétude reprise aujourd'hui par le député (LR) Jean-Louis Thiériot.

Mais aussi par le sénateur (LR) Cédric Perrin. Ce dernier s'est ému au micro de France Info de la création. Affaire à suivre.

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