La Gendarmerie vient d’encaisser un revers devant la justice administrative sur la question des mutations d’office suite à l'obligation vaccinale. Un gendarme, affecté à un poste administratif, a en effet obtenu la suspension de sa mutation d’office, le temps que soit examiné son recours préalable devant la commission de recours des militaires.
Si sur le fond le militaire n’a pas gagné, il a donc tout de même obtenu un délai, ce qui est en soi une première victoire. Dans cette affaire, plaidée en référé devant le tribunal administratif de Versailles le 10 février 2022, ce sous-officier demandait la suspension de sa mutation d’office vers le groupement de l’Essonne. Cette décision a ensuite été confirmée à la suite du rejet par le Conseil d’Etat d’un pourvoi du ministère de l’Intérieur.
Un réserviste de la Gendarmerie à la tête du ministère des Armées
Pour le gendarme, une telle mutation, expliquait-il, allait l’obliger à faire des trajets de plus de 400 kilomètres pour regagner sa résidence principale. Ce qui allait dès lors l’obliger à “réorganiser ses conditions de vie et de famille”, sa compagne, avec qui il est pacsé, vivant à son domicile et ayant un travail aux alentours.
“Une erreur manifeste”
Pour le militaire, cette mutation d’office constitue donc d’abord une sanction déguisée. “Une mutation hors branche en région parisienne n’est pas justifiée au regard des postes vacants à proximité de son actuelle affectation”, soulignait-il. “Le poste sur lequel il est affecté n’est pas adapté à ses compétences”, ajoutait-il.
Ainsi, concluait le gendarme, cette décision n’a pas tenu compte “de sa situation familiale”. Soit une violation du code de la défense, avec cette “erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur sa vie privée, familiale et professionnelle, alors qu’il existe des postes vacants à proximité de son actuelle affectation”. Le militaire avait notamment demandé un poste dans le Limousin.
Une argumentation suivie par la juge des référés dans son ordonnance, dont L’Essor a eu copie. “La mesure litigieuse prononce sa mutation à plus de 400 kilomètres de son domicile actuel”, remarque-t-elle. Pourtant, ajoute-t-elle, deux postes pouvant “correspondre à ses restrictions d’emploi, ainsi qu’à son grade, étaient vacants à 30 et 80 kilomètres de son domicile”.
“Le seul intérêt du service”
Dans son mémoire en défense, le ministère de l’Intérieur assurait au contraire que cette mutation n’avait été envisagée que “dans le seul intérêt du service de préserver les capacités opérationnelles de sa brigade”. Et de rappeler les critères du choix du gestionnaire central. A savoir de préserver la capacité opérationnelle des unités de Gendarmerie sur l’ensemble du territoire d’une part. Et d’autre part, d’identifier les régions présentant un déficit en personnels permettant d’accueillir des militaires présentant des restrictions d’emploi.
Même si les dispositions relatives à l’obligation vaccinale ont été contestées par le plaignant, il est à souligner que la magistrate n'y fait pas directement référence dans son argumentation. Toutefois, la décision rendue fragilise la position de la Gendarmerie sur les mutations d’office faisant suite à un refus de vaccination. La note express du 13 janvier 2022 de la sous-direction de la gestion du personnel fait en effet référence à des mutations d’office “systématiquement étudiées dans un cadre national”. Un périmètre désormais juridiquement fragile.