Le créateur et ancien chef du GIGN (1974-1983) Christian Prouteau, comparait depuis lundi devant le tribunal correctionnel de Paris pour une affaire à tiroirs, impliquant 19 personnes, principalement dans l'affaire des fuites au 36 Quai de Orfèvres, à Paris, alors siège de la police judiciaire de la capitale. Ce procès est parti d'un premier volet, visant en particulier Christophe Rocancourt, connu pour avoir arnaqué des riches Américains à Hollywood et New York.
Dans ce volet, "l'escroc des stars", qui vit en France, est notamment soupçonné d'avoir tenté, au printemps 2014 avec son ancien avocat Marcel Ceccaldi, de faire régulariser, moyennant paiement, deux Marocaines sans-papiers. Christophe Rocancourt avait alors sollicité l'intervention, auprès de la préfecture de police de Paris, de l'ancien chef du GIGN et, auprès du ministère de l'Intérieur, de l'ex-secrétaire d'Etat Kofi Yamgnane.
Mercredi à la barre, Christian Prouteau, 78 ans, dos légèrement voûté et voix éraillée, due aux séquelles de la gerbe de 54 plombs reçus sur le visage lors d'une intervention en 1980 contre un forcené, concède à plusieurs reprises sa "naïveté". Son intervention dans ce dossier, qu'il reconnaît, il la "regrette vraiment". "J'ai huit ans de ma vie impactés par cette affaire dans laquelle je n'ai pas fait quelque chose. J'ai voulu rendre service, ça me revient en boomerang."
Sous le regard de Me Ceccaldi mais pas de M. Rocancourt, absent depuis le début du procès pour cause de Covid, M. Prouteau met en cause le premier, "déloyal" selon lui dans la présentation tronquée qu'il lui aurait faite du dossier des deux Marocaines. Quant à Rocancourt, il n'a fait d'après lui que le "mettre en relation" avec Ceccaldi. "Rocancourt tout seul m'aurait demandé (une intervention), sincèrement, je ne l'aurais pas fait", assure Christian Prouteau.
Il comparaît pour "trafic d'influence" car il est soupçonné d'avoir monnayé cette intervention 2.500 euros, ce qu'un SMS adressé à M. Rocancourt à l'époque, et retrouvé au cours de l'enquête, accréditerait. Sur ce point, l'ancien chef de la cellule anti-terroriste de l'Elysée sous François Mitterrand, s'en est tenu à sa version d'après laquelle cet argent concernait l'achat, via un bon plan du célèbre escroc, d'une montre pour un ami chef d'entreprise à Lyon. Une version confirmée lors de l'enquête par ce témoin. "C'est la vérité", dit Christian Prouteau. Mais l'histoire est "partie en dérive", Rocancourt n'a pas fourni la montre, et l'ancien chef du GIGN dit avoir remboursé d'office son ami qui avait donné un acompte. "Vous avez été remboursé par Rocancourt?", demande le président. L'ex-gendarme rit : "Non".
(avec AFP)