Les gendarmes embarqués dans l’enquête sur la messagerie cryptée Telegram

Photo : L'application de messagerie cryptée Telegram frôle le milliard d'utilisateurs. (Photo d'illustration: Ivan_Radic/Flickr)

26 août 2024 | Société

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Les gendarmes embarqués dans l’enquête sur la messagerie cryptée Telegram

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La garde à vue du patron de Telegram, Pavel Durov, a été prolongée dimanche soir, au lendemain de son interpellation dans un aéroport parisien, un mandat de recherche ayant étant émis contre lui par des enquêteurs français visant diverses infractions de sa messagerie cryptée.

La garde à vue du patron de Telegram Pavel Durov a été prolongée dimanche soir, au lendemain de son interpellation dans un aéroport parisien, un mandat de recherche ayant étant émis contre lui par des enquêteurs français visant diverses infractions de sa messagerie cryptée.

Accompagné de son garde du corps et de son assistante qui le suivent en permanence, le milliardaire franco-russe de 39 ans Pavel Durov a été interpellé dans la soirée du samedi 24 août 2024, dans l’aérogare du Bourget, au nord de Paris, a dit une source proche du dossier à l’AFP. Le fondateur du service de messagerie cryptée Telegram venait de Bakou (Azerbaïdjan) et devait passer au moins la soirée à Paris où il avait prévu de dîner, a ajouté une source proche de l’enquête.

Selon une autre source proche de l’enquête, le juge d’instruction parisien chargé de cette information judiciaire, qui vise notamment des faits « commis en bande organisée« , a prolongé sa garde à vue dimanche soir. Elle pourrait durer 96 heures maximum. À l’issue, Pavel Durov pourrait être remis en liberté ou présenté à ce magistrat en vue d’une éventuelle mise en examen. Le parquet de Paris s’est refusé dimanche à toute communication « en l’état, s’agissant d’une procédure suivie à l’instruction ».

De nombreux faits reprochés à Telegram et son patron

L’Office chargé de la lutte contre les violences faites aux mineurs (Ofmin) avait émis un mandat de recherche contre Pavel Durov, en tant que service coordinateur d’une enquête préliminaire pour une série d’infractions (escroquerie, trafic de stupéfiants, cyberharcèlement, criminalité organisée, apologie du terrorisme et fraude), a expliqué une des sources proches du dossier.

A la suite de cela, une information judiciaire a été ouverte le 8 juillet 2024 par le pôle cyber (J3) de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco). Elle porte au total sur douze infractions, détaillées dans un communiqué la procureure Laure Beccuau. Sont également visées, entre autres, la complicité d’administration d’une plateforme en ligne pour permettre une transaction illicite en bande organisée, de détention et de diffusion de l’image d’un mineur présentant un caractère pédopornographique, d’infraction à la législation sur les stupéfiants, d’escroquerie en bande organisée ainsi que le blanchiment de crimes ou de délit en bande organisée et la fourniture de prestations de cryptologie visant à assurer des fonctions de confidentialité sans déclaration conforme.

La Justice reproche ainsi à Pavel Durov de ne pas agir contre les utilisations délictuelles de sa messagerie par ses abonnés. Notamment par une absence de modération et de collaboration avec les enquêteurs.

Les investigations ont été confiées au Centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) de l’Unité nationale cyber (UNCyber) de la Gendarmerie nationale, ainsi qu’à l’Office national anti-fraude (Onaf), dépendant des Douanes, où se déroule la garde à vue, selon deux sources proches du dossier.

Sentiment d’impunité

« Ça suffit l’impunité de Telegram », s’est félicité un des enquêteurs, étonné que le milliardaire, sachant qu’il était recherché en France, ait décidé quand même de venir à Paris. « Peut-être par sentiment d’impunité », a évoqué une des sources proches du dossier.

Sur X, anciennement Twitter – dont le patron Elon Musk a ouvertement affirmé son soutien à Pavel Durov –, l’entreprise a publié un court communiqué. Celui-ci affirme que Telegram respecte les lois de l’Union européenne, et que « sa modération est conforme aux normes du secteur et s’améliore constamment ». Elle défend son PDG et explique attendre « une résolution rapide de cette situation ».

Modération et informations personnelles

La messagerie en ligne lancée en 2013 par Pavel Durov et son frère Nikolaï, sur laquelle les communications peuvent être chiffrées de bout en bout et dont le siège social se trouve à Dubaï, s’est positionnée à contre-courant des plateformes américaines, critiquées pour leur exploitation mercantile des données personnelles. Telegram s’est notamment engagée à ne jamais dévoiler d’informations sur ses utilisateurs.

Dans l’émirat du Golfe, la messagerie Telegram s’est mise à l’abri des règles de modération des Etats, à l’heure où l’Union européenne comme les Etats-Unis mettent sous pression les grandes plateformes pour supprimer le contenu illégal. Par ailleurs, la plateforme aux 900 millions d’utilisateurs pourrait, selon son fondateur, « probablement (dépasser) le milliard d’utilisateurs mensuels actifs d’ici un an ».

(Avec l’AFP)

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