Le tribunal administratif de Rennes a annulé la sanction disciplinaire qui avait été infligée en mars 2022 à un gendarme de la Brigade territoriale autonome (BTA) de Bain-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine) qui était accusé par ses chefs de n'avoir "prêté aucune attention" à la demande d'une femme souhaitant porter plainte contre son ex-concubin pour "harcèlement moral".
Pierre-David XXX avait, en fait, été trahi par le commentaire "défavorable" laissé par l'intéressée "sur un site internet" : elle avait souhaité y "exprimer son mécontentement" sur l'accueil que lui avait réservé la gendarmerie le 19 décembre 2021, relate le tribunal administratif de Rennes, dans un jugement en date du 17 avril 2024, qui vient d'être rendu public.
Après "vingt minutes de discussion", le gendarme n'avait "pas été aussi avenant que cette personne l'avait espéré", avouera-t-il plus tard dans un courrier versé à la procédure : cette femme était venue "demander des conseils" à la gendarmerie et "porter à la connaissance des enquêteurs des enregistrements vocaux" laissés par son ex-concubin – contre qui elle avait déjà porté plainte – mais le militaire estimait que les faits qu'elle dénonçait étaient en fait "d'ordre privé" et "n'étaient pas constitutifs d'une infraction" pénale.
Pierre-David XXX lui avait donc simplement conseillé de "s'affirmer" face à son ex-concubin et avait simplement "noté ses coordonnées afin d'aviser l'enquêteur en charge de son dossier".
Ce gendarme – entré dans la gendarmerie 21 ans plus tôt, en 1999 – et qui s'est à présent reconverti comme conducteur de bus scolaire – avait finalement été sanctionné le 15 mars 2022 de dix jours d'arrêt avec sursis par le commandant du groupement de gendarmerie départementale d'Ille-et-Vilaine.
Ses chefs l'avaient "invité" à ne pas discréditer l'Insitution
Le 15 octobre 2022, il avait donc saisi le tribunal administratif de Rennes pour faire censurer cette "sanction disproportionnée", mais aussi pour faire "modifier" sa fiche de notation pour l'année 2022. "Il doit s'efforcer de répondre au mieux aux sollicitations du public, que cela soit en tant que chargé d'accueil ou en intervention", avait en effet écrit son supérieur hiérarchique. "Il est invité à faire évoluer son comportement envers nos concitoyens afin de ne pas discréditer l'institution. Il regagnera ainsi la confiance de ses chefs."
Mais "aucun élément probant versé au dossier ne révèle que M. XXX aurait, soit par manque de courtoisie ou d'impartialité, soit par réticence à enregistrer la déposition qui lui était soumise, manqué à la déontologie militaire", objecte le tribunal administratif de Rennes dans son jugement.
En outre, la sanction litigieuse a été prise "au motif que M. XXX n'aurait prêté aucune attention à la demande d'une personne souhaitant porter plainte" alors que le Directeur général de la Gendarmerie nationale admettra finalement plus tard, en juillet 2022, "qu'une partie des faits devaient être considérés comme matériellement inexacts".qu'une partie des faits devaient être considérés comme matériellement inexacts". Ayant reconnu que la femme "ne souhaitait pas déposer plainte", il avait donc modifié les motifs de la sanction, mais sans que cela n'ait eu "une incidence" sur la hauteur de la peine du requérant.
Or, une suspension de fonctions "constitue l'une des sanctions les plus sévères" parmi celles du "premier groupe" de l'arsenal disciplinaire de la gendarmerie, rappellent les juges administratifs rennais. Et "il n'est ni établi ni allégué que la manière de servir de M. XXX – dont il est constant qu'il n'avait pas l'habitude de s'occuper des fonctions d'accueil du public – ait été évaluée défavorablement antérieurement au prononcé de la sanction", soulignent-ils.
"Aucun autre élément ne tend à révéler que d'autres personnes auraient manifesté leur mécontentement à l'égard de l'accueil qui leur avait été réservé par M. XXX", ajoutent les magistrats. "Dans ces conditions, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ne pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, se fonder sur un seul avis isolé, exprimé sur un site internet, pour sanctionner M. XXX de dix jours d'arrêt assortis d'un sursis à exécution. l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ne pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, se fonder sur un seul avis isolé, exprimé sur un site internet, pour sanctionner M. XXX de dix jours d'arrêt assortis d'un sursis à exécution."
(MJ, PressPepper)