La Gendarmerie pourrait bientôt être condamnée à indemniser l’ancienne commandante en second de la compagnie de gendarmerie départementale de Deauville (Calvados) pour le "harcèlement moral" qu’elle a subi. Celle-ci a demandé que son nom ne soit pas rendu public. Le 15 octobre, le rapporteur public a préconisé à la cour administrative d’appel de Nantes de condamner la Gendarmerie. En première instance, en septembre 2019, le tribunal administratif de Caen avait désavoué la gendarme. La cour administrative d’appel de Nantes a mis sa décision en délibéré et rendra son arrêt dans les prochaines semaines.
Les faits remontent à 2015
Pour rappel des faits, cette officière avait été mutée en janvier 2015 comme chargée de mission à Caen au sein du Bureau de la performance et de la cohérence opérationnelle (BPCO) de la région de gendarmerie de Basse-Normandie (RGBN). La gendarme, également "mère isolée", avait imputé cette "mise au placard" à son souhait initial de rester à Deauville, aux côtés de son jeune fils, atteint de troubles autistiques, après qu’elle ait réussi à le scolariser dans une classe adaptée. Comme le souligne le rapporteur public, cette capitaine avait été affectée "sans fiche de poste", dans un local "à côté des archives", avec du matériel "vétuste". Elle avait également été "privée de son arme de service et de son téléphone" et ne figurait plus dans l’annuaire professionnel de la Gendarmerie.
Déjà 12 procédures de la plaignante contre la Gendarmerie
Pour justifier sa mutation, la Gendarmerie avait souligné les "difficultés" relationnelles de la capitaine avec ses sous-officiers et d’autres gradés. Des "refus d’obéissance" et une "attitude irrespectueuse" lui ont été reprochés. Lors de l’audience, le rapporteur public a d’ailleurs reconnu que l’attitude "relativement contestataire" de cette gendarme "n’aide pas dans un environnement militaire". Autre particularité : la plaignante est une habituée des procédures à l’encontre de la Gendarmerie depuis sa "mise au placard" à Caen, en 2015. Elle en a déjà introduit 12. Elle a déjà fait condamner la Gendarmerie, devant cette même Cour administrative d’appel de Nantes, quand sa hiérarchie s’est opposée à un don de jours de RTT par ses collègues, afin qu’elle puisse s’occuper de son fils autiste.
Elle réclame 187.000 euros de dédommagements
Depuis cette affaire, la capitaine de Gendarmerie a quitté la Normandie et a été mutée dans une unité de l'Ile-de-France. Finalement, le rapporteur public, dont les avis sont souvent suivis par les juges, propose de condamner la Gendarmerie à verser 6.000 euros de dédommagements. Il "établit" en effet l’existence d’une "situation de harcèlement moral" à son encontre sur une "période longue". Elle pourrait aussi toucher 1.500 euros supplémentaires pour les frais de justice.
Pour l’avocate de la capitaine de Gendarmerie, le calcul des préjudices subis par sa cliente est insuffisant. Elle les avait évalués à 187.000 euros. L’avocate ajoute que la capitaine est désormais "black-listée". Le 15 octobre, l’avocate a également ajouter que le harcèlement moral, dont s’est plaint sa client, avait aussi un caractère discriminatoire. "Ma cliente est d'origine arabe, elle a aussi subi des attaques racistes dont on n'a jamais parlé", a assuré l'avocate aux juges.