Depuis le début de l’été, plusieurs Groupements de gendarmerie et Centres d’information et de recrutement publient des annonces pour le moins inattendues sur leurs réseaux sociaux. Alors que l’on est habitué à y voir des images évoquant les différents métiers ou proposant au grand public d’intégrer la Gendarmerie sous différents statuts, ces publications s’adressent tout particulièrement aux réservistes opérationnels.
Un recrutement exceptionnel est en effet ouvert spécifiquement pour les réservistes, afin de devenir gendarme adjoint volontaire (GAV), spécialité "agent de police judiciaire adjoint" (APJA). Lancé en plein milieu de l'été, il devrait perdurer au moins jusqu'en fin d'année 2022.
Pas de retour à l’école
A noter pour ce recrutement extraordinaire, l’absence pour certains de ces réservistes d’un besoin de revenir sur les bancs d’une école de gendarmerie. L’Arme considère en effet que si trois conditions majeures sont remplies, le (ou la) réserviste pourra immédiatement servir en tant que gendarme adjoint volontaire, sans formation complémentaire. Pour cela, il (ou elle) doit :
- détenir la qualité d’agent de police judiciaire adjoint (APJA);
- avoir effectué au minimum 20 jours d’activité dans la réserve, au sein d’une unité opérationnelle;
- et être jugé apte à exercer immédiatement les fonctions d’APJA au sein d’une unité opérationnelle.
C’est surtout sur ce dernier point, laissé à l'appréciation des entités de recrutement en fonction notamment des notations des réservistes, que sera décidé ou non le besoin d’une formation complémentaire et d'un retour en école.
Si leurs états de service laissent entrevoir des lacunes ou des manques et que cela s’avère nécessaire, une formation assouplie de six semaines (contre treize pour les candidats issus du civil et sans expérience) pourra alors être prescrite aux candidats issus de la réserve. Pour les autres, jugés aptes, la formation continue sera effectuée directement au sein des unités où ils seront affectés.
Pour rappel, les réservistes issus du monde civil reçoivent une formation initiale qui s'étale, suivant les régions et les capacités de formation, d'une quinzaine de jours à un mois. Aujourd'hui, tous les réservistes opérationnels suivent la formation d'agent de police judiciaire adjoint (APJA), leur permettant d'obtenir une habilitation indispensable à la réalisation de certains actes, comme par exemple relever des infractions ou consulter certains fichiers.
Implantation locale et quasi-immédiate
Le recrutement de ces jeunes, âgés de 18 à 26 ans maximum, va donc pouvoir être très rapide. Presque d'une semaine pour la suivante si le retour en école ne s'avère pas indispensable. Alors que le processus normal –de l’inscription à l'incorporation en école, puis l’arrivée en unité– prend généralement plusieurs mois.
En outre, un avantage de taille est proposé à ces jeunes réservistes pour leur engagement en tant que gendarme adjoint volontaire: la possibilité, s’ils le souhaitent, d’être affectés dans le département d’où ils sont originaires et pour lequel ils ont déjà effectué quelques missions en tant que réserviste. D'habitude, l'affectation se fait au niveau régional, en fonction du classement de l'élève gendarme adjoint en sortie d'école, et suivant les places disponibles en unités. Cette assurance d'un engagement de proximité est donc un argument de poids pour certains jeunes réservistes que la mobilité régionale aurait freinés.
#recrutement
Posted by Gendarmerie de Saône et Loire on Thursday, August 4, 2022
La mise en évidence d'un problème de ressources humaines
Cette opportunité d’engagement n’est pas sans laisser entrevoir quelques problèmes. De fait, cet appel aux réservistes pour qu'ils franchissent le pas d'un engagement à temps plein, montre aussi la difficulté que rencontre, ces dernières années, l’Institution à recruter .
Déjà, le taux de sélectivité était relativement faible pour les gendarmes adjoints par rapport aux sous-officiers. Un constat évoqué par le Directeur général, Christian Rodriguez, lors d’une récente audition à l'Assemblée nationale. Devant les députés de la commission de la Défense, il indiquait ainsi que la sélectivité pour le recrutement de GAV était actuellement d'un candidat retenu sur trois. Ce taux s’établit à un pour six ou sept candidats pour les sous-officiers.
Mais le problème se situe également du côté des départs des GAV, nombreux et de moins en moins compensés par les entrées. Première raison à cela, le non-renouvellement de contrats avant l’arrivée à terme des cinq ou six années maximales d’engagement. Une partie passe le concours pour devenir sous-officier en interne, ce n'est pas une perte à proprement dit. Une autre partie s'en va pour diverses raisons personnelles ou professionnelles, comme par exemple l’inadéquation du métier exercé avec ce qu'ils en attendaient.
Enfin la question de la ressource en réservistes opérationnels se pose également, alors que l'objectif est d'atteindre les 50.000 gendarmes réservistes d'ici 2027 (contre un peu plus de 31.000 aujourd'hui). Notamment si ce recrutement exceptionnel venait à prendre de l'ampleur. Mais cela reste peu probable.