C’est un fil de messages postés sur X (anciennement Twitter) qui démontre la difficulté du travail des gendarmes confrontés aux violences conjugales. Publié ce dimanche 14 janvier 2024 par "Gentil Gendy", un gendarme départemental anonyme, il raconte une première intervention, il y a deux ans, au domicile d’un couple.
"Sur place, on retrouve une jeune femme, le visage tuméfié, les bras marqués, un téléphone cassé et des robes déchirées. Elle est en pleurs et a peur. On ne réfléchit pas et on place le conjoint en garde à vue".
Il y a deux ans , j'interviens pour des violences conjugales chez un couple.
Sur place, on retrouve une jeune femme, le visage tuméfié, les bras marqués, un téléphone cassé et des robes déchirées. Elle est en pleurs et a peur. On ne réfléchit pas et on place le conjoint— 🇨🇵 Gentil Gendy🇲🇫 (@GendyGentil) January 14, 2024
L’homme est un étranger en situation irrégulière et "honnêtement, dans ces cas là, c'est galère", explique le gendarme qui précise, laconique: "la procédure est chiante". Il lui faut en effet réaliser une double procédure, judiciaire pour les violences et administrative pour l'entrée irrégulière sur le territoire et trouver un interprète pour la notification des droits. L’homme ne sent en outre pas bien et il faut donc mobiliser le peloton de surveillance et d’intervention (Psig) "pour l'emmener à l'hôpital pour un examen médical".
Elle commence à lui trouver des excuses
Arrive alors le moment de l’audition de la victime, mais celle ci ne veut plus déposer plainte et "commence à lui trouver des excuses". Une attitude courante dans les cas de violences conjugales, pour lesquelles les victimes sont sous l’emprise de leur bourreau. Cela n’empêche pas les gendarmes de traiter la procédure, même sans plainte. Ils en ont d’ailleurs l’obligation. La procédure administrative prend le pas sur la procédure judiciaire et l’homme est placé en centre de rétention administratif, à environ trois heures de route, où trois gendarmes doivent le conduire.
"Pour nous la procédure est terminée", constate, soulagé, Gentil Gendy, mais il y a trois mois, il voit sur sa "messagerie un billet de garde à vue pour des violences conjugales". Le même homme a violenté la même femme, mais cette fois devant un enfant.
Le gendarme sait comment tout cela va se finir
La femme ne souhaite à nouveau pas déposer plainte contre le père de sa fille, née durant le retour illégal de son compagnon, qui a pu demander un titre de séjour à la suite de cette grossesse. Les voilà désormais mariés et "Madame refuse l'examen en victimologie, amène un repas le midi a son mari, demande comment il va…" déplore Gentil Gendy. Il se "sent démuni" car il "sait parfaitement comment tout ça va se finir".
L’homme est convoqué devant le tribunal fin 2024 et sa "femme vient le chercher“, lui "fait un câlin devant la brigade" tandis que "lui n'a aucun geste affectueux envers sa petite, il s'allume une clope et monte dans la voiture. La famille repart. Je suis persuadé que nous interviendrons à nouveau chez eux. J'espère juste que ce ne sera pas pour un drame".