Interrogé par L'Essor, la direction de la Gendarmerie à Paris a précisé que la peine d'amende prononcée le 28 mai 2021 par la Cour d'appel de Paris, "une décision définitive de la justice" à l'encontre du colonel Steiger, l'avait été "sans inscription au casier judiciaire". "Ainsi fondée, poursuit la DG, la décision, ne faisait pas obstacle à ce que la direction de la Gendarmerie ne le nomme à son poste actuel".
Le colonel Eric Steiger, nommé commandant de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie le 8 juillet, a été condamné deux mois auparavant pour violences physiques et psychologiques sur son épouse. Il était arrivé en Nouvelle-Calédonie en août 2020 en qualité de commandant en second de la gendarmerie.
Une peine de prison transformée en amende
Selon Mediapart, cet officier supérieur de 48 ans avait été condamné en première instance, en février 2020, à six mois de prison avec sursis pour des violences commises entre novembre 2017 et juin 2018 sur son épouse. Une peine ramenée en appel à 6.000 euros d'amende par la Cour d'appel de Paris, en mai 2021.
Le site d'information précise que l'épouse d'Eric Steiger avait, dans sa plainte déposée début juin 2018, expliqué avoir été bloquée contre une armoire, la tête violemment tordue, et avoir été traitée "d'illettrée, saleté ou grosse conne". La fille ainée du couple serait intervenue plusieurs fois pour venir en aide à sa mère.
De son côté, la direction de la Gendarmerie indique que les "faits ont fait l'objet d'une expertise judiciaire menée par un service extérieur à la Gendarmerie". Pour la DG, les circonstances sont, selon la rédaction même des juges, "un contexte douloureux de séparation du couple après 20 ans de vie commune qui s'étaient passés sans incident de violence". Elle ajoute que la colonel Steiger "a rendu compte à sa hiérarchie de chaque étape de la procédure".
Réactions en Nouvelle-Calédonie
Cette affaire de violences conjugales a fait réagir des élus de tous bords en Nouvelle-Calédonie. "J'ai signalé cette nuit aux plus hautes autorités de l'Etat que cette fonction était incompatible avec ce type de délit et qu'il fallait au plus vite prendre la décision de renvoyer ce colonel en Métropole", écrit Sonia Backes, présidente de la province Sud où se trouve Nouméa, sur son compte Facebook. L'élue non indépendantiste ajoute que "dans un pays où 22% des femmes sont victimes de violences (…), la décision de changer la tête de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie ne doit pas souffrir d'une hésitation".
Dans un pays où 22% des femmes sont victimes de violence, et où les institutions ont placé la lutte contre les violences intrafamiliales en cause territoriale, la décision de changer la tête de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie ne doit pas souffrir d’une hésitation.
Au delà, on peut s’interroger à la lecture des faits reprochés sur la capacité de sang froid indispensable à cette fonction dans la période troublée, et sensible dans laquelle se trouve la Nouvelle-Calédonie.
Sonia Backes, présidente de la province Sud de Nouvelle-Calédonie
Dans un communiqué, les députés Philippe Gomes et Philippe Dunoyer, ainsi que le sénateur Gérard Poadja, tous membres du parti de centre droit Calédonie Ensemble, considèrent que cette condamnation "disqualifiait le colonel Eric Steiger" et demandent son "remplacement". Ils citent les propos récents du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Celui-ci a récemment affirmé que "tout gendarme condamné pour violences conjugales ne devait plus être en contact avec le public" et que "les traitements de ces violences seraient désormais prioritaires pour les policiers et gendarmes partout en France".
Le président du Rassemblement-LR et ancien président du gouvernement Thierry Santa, estime "qu'aucun dépositaire de l'autorité publique ne peut continuer à exercer ses fonctions quand il se rend coupable de tels agissements". Faisant allusion au troisième référendum sur l'indépendance, qui se tiendra dans moins de quatre mois, le 12 décembre, les indépendantistes du FLNKS "exigent le remplacement immédiat du numéro un de la gendarmerie qui ne saurait incarner la droiture et l'engagement de l'exercice des compétences régaliennes sur place, qui à ce jour, est encore aux mains de l'Etat".
Saint-cyrien et diplômé de l'Ecole de guerre, le colonel Steiger, 25 ans de service dans l'Arme, a notamment commandé le groupement de l'Hérault (2011-2014) avant d'être chargé de mission à la DGGN. Il est également chevalier de la Légion d'honneur et officier de l'ordre national du Mérite.
PMG
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