Décès d’Hubert Germain, le der des ders des Compagnons de la Libération (ACTUALISÉ)

Photo : Hubert Germain, dernier Compagnon de la Libération, décédé le mardi 12 octobre à l'âge de 101 ans (Photo: Ordre de de la Libération),

12 octobre 2021 | Société

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Décès d’Hubert Germain, le der des ders des Compagnons de la Libération (ACTUALISÉ)

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Hubert Germain, le der des ders des 1.038 Compagnons de la Libération est donc parti, treize ans après Lazare Ponticelli, le der des ders des Poilus, décédé le 12 mars 2008 à l'âge de 110 ans. Tous deux avaient combattu dans les rangs de la Légion étrangère. Hubert Germain reposera dans la crypte du Mont Valérien, aux […]

Hubert Germain, le der des ders des 1.038 Compagnons de la Libération est donc parti, treize ans après Lazare Ponticelli, le der des ders des Poilus, décédé le 12 mars 2008 à l'âge de 110 ans. Tous deux avaient combattu dans les rangs de la Légion étrangère. Hubert Germain reposera dans la crypte du Mont Valérien, aux côtés de seize autres militaires et civils morts pour la France de 1939 à 1945.

"Compagnons d'éternité"

Une première cérémonie d'hommage national, présidée par Emmanuel Macron, s'est déroulée ce vendredi après-midi sous un chaud soleil d'automne dans la cour d'honneur des Invalides. Une cérémonie militaire bouclée en une trentaine de minutes devant la famille de Hubert Germain, des descendants de Compagnons de la Libération et des collégiens de deux établissements parisiens. Le cercueil recouvert par le drapeau tricolore a été porté par dix légionnaires coiffés du képi blanc jusqu'au centre de la cour. Suivaient trois autres légionnaires portant des coussins rouges avec les décorations de Hubert Germain, dont la grand'croix de la Légion d'honneur et un képi blanc, devant un détachement de la prestigieuse 13e demi-brigade de la Légion étrangère, unité à laquelle appartenait Hubert Germain durant la Seconde Guerre mondiale. Une unité qui fait partie des 18 unités Compagnons de la Libération.

La musique de la Garde républicaine a joué le "Salut au caïd" et le "Boudin", deux musiques de la Légion. Lors d'un discours d'une dizaine de minutes, le président Macron a qualifié la vie d'Hubert Germain "d'anthologie du courage" alors que celui-ci rejoint aujourd'hui ses "ses Compagnons d'éternité". Il a promis que l'ordre de la Libération lui survivra, "j'en fait le serment". Le cercueil a ensuite quitté la cour d'honneur, toujours porté par dix légionnaires, et suivi par la famille d'Hubert germain et le couple présidentiel. Une sonnerie traditionnelle de la Légion, composée il y a des lustres à l'occasion du départ à la retraite d'un légionnaire, intitulée "Les Adieux", a accompagné cette sortie. La sonnerie avait été jouée en novembre 2020 au même endroit après le décès de Daniel Cordier, avant-dernier Compagnon de la Libération. Hubert Germain, présent alors à la cérémonie, avait émis le voeu qu'elle soit interprétée à sa mort.

Le jeudi 11 novembre, une seconde cérémonie aura lieu pour l'inhumation d'Hubert Germain. Après un passage à l'Arc de Triomphe, le cercueil prendra la route du Mont Valérien. Hubert Germain reposera dans la crypte du Mémorial de la France combattante où un caveau vide attend le dernier des Compagnons de la Libération.

La dernière apparition publique d'Hubert Germain remontait au 18 juin 2021. Ce jour là, devant le Mémorial de la France combattante au Mont Valérien, il avait participé au 81e anniversaire de l'Appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle. À la fin de la cérémonie, Hubert Germain avait ensuite accompagné le Président de la République Emmanuel Macron dans la crypte, durant un quart d'heure.

Le dernier carré des Compagnons de la Libération

Continuer le combat

Fils d'un officier général des troupes coloniales, Hubert Germain naît le 6 août 1920 à Paris. Après des études secondaires à Damas, il entre au lycée Albert Sarraut à Hanoï, puis au lycée Saint-Louis à Paris. À la déclaration de guerre, bachelier, il prépare le concours de l'Ecole navale au lycée Michel Montaigne de Bordeaux. Dès juin 1940, alors que l'armée française subit la plus grande défaite de son histoire, il veut continuer la lutte en gagnant le Maroc.

Après une discussion à l'état-major général, replié à Bordeaux, avec un officier général ami de son père, Hubert Germain apprend que l'Afrique du Nord ne rentrera pas dans la guerre. Il prend alors la décision personnelle de continuer le combat. Des troupes polonaises s'embarquant pour l'Angleterre à Saint-Jean-de-Luz. Il se joint à elles, avec trois camarades. Il embarque alors sur l'Arandora Star, un paquebot britannique qui appareille pour la Grande-Bretagne le 24 juin 1940. Engagé dès l'origine dans les Forces françaises libres, il est affecté sur le cuirassé Courbet comme élève officier de marine. Hubert Germain participe à la défense antiaérienne contre les raids allemands. Au printemps 1941, il rejoint l'état-major du général Paul Legentilhomme, commandant en Palestine la 1ère division légère française libre, destinée à intervenir au Levant. 

Fidèle au béret vert

Hubert Germain participe ensuite à la campagne de Syrie avant d'intégrer, en septembre 1941, l'école d'officiers de Damas. Nommé aspirant, il est affecté au 2e Bureau (renseignements) de la 1ère brigade française libre (BFL) du général Marie-Pierre Koenig. En février 1942, il rejoint le 2e bataillon de la 13e demi-brigade de la Légion étrangère (DBLE), une unité qui aura participé de juin 1940 à mai 1945 à tous les combats de la France Libre. Il y restera attaché toute sa vie, marquant sa fidélité par le port du béret vert à chaque cérémonie.

Dès lors, Hubert Germain prend part à la campagne de Libye. Chef de section antichars, il se distingue lors de la bataille de Bir Hakeim dans le désert libyen (27 mai – 11 juin 1942). Une victoire défensive qui ralentira l'avancée de l'Afrikakorps de Rommel vers l'Egypte. Cité à l'ordre de l'armée pour avoir montré "de très belles qualités de chef " en étant "un exemple constant de calme et de courage", Hubert Germain est promu sous-lieutenant en septembre 1942. En 2012, il dira à l'auteur de ces lignes: "Si nous avions lâché à Bir Hakeim, c'en était fin de la France Libre".

Hubert Germain combat ensuite à l'Himeimat (El Alamein) en Egypte, en octobre 1942, puis en Tunisie jusqu'en mai 1943. En Italie, le 24 mai 1944, devant Pontecorvo, près du Mont Cassino, le lieutenant Germain est blessé en dirigeant le tir des mitrailleuses lourdes de sa section. Évacué sur Naples, il reçoit la Croix de la Libération des mains du général de Gaulle, en Italie, fin juin 1944.

 Fidèle gaulliste

Il participe ensuite au débarquement de Provence (août 1944), à la libération de Toulon, de la vallée du Rhône et de Lyon ainsi qu'aux campagnes des Vosges et d'Alsace, et termine la guerre dans le sud des Alpes, au massif de l'Authion, dans les Alpes du sud.

Démobilisé en 1946, il travaille dans une entreprise de produits chimiques. Élu maire de Saint-Chéron (Essonne) en 1953, il conservera son mandat jusqu'en 1965.  Fidèle gaulliste, il entame en 1962 un mandat de député de Paris. Il occupe le poste de vice-président du groupe UDR à l'Assemblée nationale (1971-1972). Hubert Germain sera ensuite ministre à deux reprises: des PTT (1972-1974) et des Relations avec le Parlement (mars à mai 1974).

Membre du conseil de l'Ordre de la Libération depuis décembre 2010, il avait été nommé chancelier d'honneur de l'Ordre de la Libération en novembre 2020. Il portait la grand'croix de la Légion d'honneur, la plus haute dignité de l'ordre, la Croix de guerre 39/45 avec palmes et la médaille de la Résistance avec rosette. Homme amène et plein d'humour, il racontait sa guerre sans affèterie. Il avait témoigné de son passé de Français Libre dans "Espérer pour la France" (2020, Les Belles Lettres).

Le caveau 9 resté vide

Le dernier des Compagnons de la Libération reposera donc dans la crypte du Mont Valérien, dans le caveau N° 9, resté vide pour le dernier Compagnon. Entre Georges Brière (caveau 8), matelot au 1er régiment de fusiliers-maris tué à l'âge de 21 ans le 25 novembre 1945 à Giromagny (Territoire de Belfort), et Alfred Touny (caveau 10), résistant fusillé à l'âge de 57 ans en avril 1944 à Arras (Pas-de-Calais).

La crypte abritera ainsi désormais 17 caveaux, dont celui d'Hubert Germain. Ceux de douze militaires, dont deux tirailleurs d'Afrique noire et deux tirailleurs d'Afrique du nord, et quatre soldats des Forces françaises libres. Ainsi que ceux de cinq résistants de l'intérieur, dont un FFI du maquis du Vercors, un de la résistance indochinoise et deux femmes Berty Albrecht et René Lévy.

Pierre-Marie GIRAUD

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