La tentative d'assassinat de Donald Trump, samedi 13 juillet 2024 lors d'un meeting en Pennsylvanie, a mis en lumière de graves lacunes dans le dispositif de sécurité du candidat à la présidence des Etats-Unis. Deux anciens gendarmes chargés de la sécurité présidentielle française, Daniel Cerdan et un ex-membre du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR), livrent leur analyse.
Une préparation insuffisante
Pour ces experts, la première erreur est le manque évident de préparation. "Il y a eu une erreur dans le filtrage, dans le contrôle des individus et dans le fait de tenir les points du terrain qui peuvent être problématiques", pointe Daniel Cerdan, ancien du GIGN et ex-commandant de la Compagnie de sécurité de la présidence de la République.
Le fait qu’un homme ait pu s’introduire avec une arme de guerre dans un tel périmètre, puis monter sur un toit non sécurisé, est également vu comme une erreur. "Normalement, toutes les caractéristiques du terrain sont tenues, qui plus est les toits. Tout cela doit être déminé, sécurisé et tenu", ajoute son collègue qui a fait partie du GSPR.
Les deux experts s'accordent sur un point crucial : l'absence – "incroyable" pour Daniel Cerdan – de mallette pare-balles en Kevlar. "Cela m'a étonné qu'il n’y ait pas de dépliants kevlar", renchérit le gendarme du GSPR. "Ce n’est peut être pas dans les traditions du Secret service, mais cela peut aider". Le mur d’agent autour de Donald Trump peut en effet donner une fausse impression de sécurité. "L’arme utilisée, un AR 15, est une arme de guerre", précise-t-il. "cela peut traverser les agents, pas forcément leur buste, surtout avec les gilets pare balles qu’ils portent, mais l’autorité peut être touchée si la balle traverse une zone moins épaisse comme leur bras".
Problème de communication
Bien qu’ils aient neutralisé l’assaillant, la position des tireurs d'élite est également critiquée par Daniel Cerdan qui remarque, en observant les images des télés américaines, que "l’un est sur un trépied, et l'autre accroupi, alors que de son côté, l'assaillant a une bonne position de sniper." Il ajoute: "Au GIGN, il y a un tireur et un observateur. Comment avoir 180° de surveillance à travers une petite lunette?".
Par ailleurs, l’information selon laquelle un tireur avait été repérée aurait dû remonter plus vite aux oreillettes du Secret service. L'ancien du GSPR pointe "une problématique de coordination de la chaîne de communication", expliquant qu'en France, "les forces de sécurité locales, qui surveillent le périmètre plus large doivent rendre compte des cas non conformes au responsable local des forces de sécurité, qui est avec le responsable du GSPR. Celui-ci peut aussitôt répercuter une information de cette nature."
"Effaré d’un tel amateurisme"
Pour Daniel Cerdan, la réaction des agents après les tirs était inappropriée, notamment en laissant l’ancien président se dresser et tendre le bars pour prendre la pose. "Donald Trump est gros, grand et fort. Ils auraient dû le plier en deux. On se met derrière l’autorité, la prend au niveau de la taille pour qu’elle se baisse et on part", précise l’ancien officier qui a enseigné la protection rapprochée dans le cadre d’une mission de l’ONU.
"Je suis effaré d'un tel amateurisme. Si j’étais son responsable, je virerais le patron du Secret Service", conclut Daniel Cerdan sans détour.