La France va-t-elle manquer de forces dédiées au maintien de l’ordre? Pour l’instant, celles-ci sont surtout suremployées et pour des missions trop diverses, ce qui les empêche de se former correctement, selon un rapport de la Cour des comptes publié ce mercredi 3 avril 2024.
Les sages de la rue Cambon rappelle que, la révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée en 2008 a conduit à des réductions d’effectifs des forces mobiles alors qu’elles font, depuis, face à des "épisodes de maintien de l’ordre soutenus", étendus à l’ensemble du territoire, et "caractérisés par une virulence particulière dont témoigne le nombre de blessés recensés lors d’opérations de maintien de l’ordre au cours des six dernières années".
Dans le même temps, "l’action des forces mobiles est aussi orientée vers des missions qualifiées de permanentes pour leur caractère continu mais parfois éloignées de leurs compétences spécifiques de maintien de l’ordre et de sécurisation", pointe le rapport qui cite gardes statiques, lutte contre l’immigration clandestine, ou présence dans les quartiers sensibles.
Ce suremploi et cette dispersion impactent les temps de formation et de repos des forces mobiles.
Des stages plus éloignés
Ainsi, le stage de deux semaines au centre national d’entrainement des forces de gendarmerie (CNEFG) de Saint-Astier en Dordogne doit être effectué théoriquement tous les deux ans et demi. Pourtant, regrette la Cour des comptes, "la durée moyenne entre deux passages d’un même escadron à Saint-Astier est passée de deux années et demie à 3 ans et 10 mois" entre 2017 et 2022. Ainsi, sur les 57 formations planifiées en 2023, 21 "ont été d’ores et déjà annulées, interrompues ou reportées".
Au-delà de la sollicitation des escadrons pour diverses missions, la capacité du CNEFG à les accueillir est également questionnées par la Cour des comptes qui note que "la concentration de formations individuelles diplômantes sur le site de Saint-Astier créé un engorgement des plages d’entraînement disponibles qui contribue également à étirer dans le temps le passage des escadrons".
Par ailleurs, "le contexte de plus en plus violent des zones spécifiques d’intervention de la gendarmerie mobile (OPEX, outre-mer) a conduit à la mise en place d’un plan d’entrainement à l’aguerrissement sous le feu des escadrons de gendarmes mobiles", au camp militaire de Beynes dans les Yvelines.
Nécessaire, ce surcroît de formation "se superpose à un plan de charge déjà important pour les escadrons de gendarmerie mobile, qui peinent à remplir leurs obligations", note la Cour des comptes.
Professionnalisme
Un moindre niveau de formation peut avoir des conséquences sur la sécurité des gendarmes ou leur capacité à accomplir leur mission. Elle peut aussi entrainer une baisse de compétence préjudiciable à ses adversaires. C’est en effet, rappelle les sages de la rue Cambon le "savoir-faire de haut niveau" des forces mobiles qui entraîne "le faible taux de signalements transmis à la Défenseure des droits pour des violences commises contre des manifestants lors des journées nationales d’action contre la réforme des retraites en 2023 (20% seulement des signalements concernent les forces mobiles)".
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