La mobilisation exceptionnelle de 40.000 gendarmes et policiers n’est pas parvenue à empêcher émeutes et saccages la nuit dernière (article mis à jour avec de nouveaux chiffres de l’Intérieur et de Macron)

Photo : A Roubaix, les forces de l'ordre face à des tirs de mortier lors d'une nouvelle nuit d'émeutes, en réaction à la mort de Nahel. (photo d'illustration : AFP)

30 juin 2023 | Opérationnel

Temps de lecture : 3 minutes

La mobilisation exceptionnelle de 40.000 gendarmes et policiers n’est pas parvenue à empêcher émeutes et saccages la nuit dernière (article mis à jour avec de nouveaux chiffres de l’Intérieur et de Macron)

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Bâtiments publics dégradés, magasins pillés, véhicules incendiés. De nombreuses villes de région parisienne et de province se réveillent vendredi 30 juin 2023 avec les stigmates d'une nouvelle nuit de violences, la troisième depuis la mort mardi à Nanterre de Nahel, tué par un policier. Au total, selon les chiffres donnés par Emmanuel Macron vendredi en début d'après-midi, 492 bâtiments ont été touchés, 2 000 véhicules brûlés et 3 880 incendies de voie publique.

Saisi par une vidéo amateur, le tir à bout portant du fonctionnaire de police sur l'adolescent lors d'un contrôle routier mardi à Nanterre, continue à embraser de nombreux quartiers populaires du pays. Pour endiguer une "généralisation" des violences urbaines, les autorités avaient mobilisé 40.000 policiers et gendarmes, ainsi que des unités d'intervention d'élite comme le Raid (Police nationale), la Brigade de recherches et d'intervention (BRI – Préfecture de police de Paris) ou le Groupe d'intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). Malgré ce déploiement massif, des violences et des dégradations ont eu lieu dans de multiples villes.

Pour la deuxième fois en deux jours, le président Emmanuel Macron va présider une nouvelle cellule interministérielle de crise à 13h00, ce vendredi à Paris. "Il n'y a pas d'affrontement très violent en contact direct avec les forces de l'ordre, mais il y a un certain nombre de magasins vandalisés, de commerces pillés voire incendiés", a détaillé un haut gradé de la Police nationale.

Cela a été le cas dans le coeur de Paris, aux Halles et dans la rue de Rivoli qui mène au Louvre, mais aussi en banlieue parisienne, dans l'agglomération de Rouen, à Nantes et à Brest, où le sous-préfet Jean-Philippe Setbon a décrit à l'AFP "beaucoup d'affrontements entre policiers et petits groupes très mobiles".

Cocktail Molotov, fusées d'artifice

En Seine-Saint-Denis, "quasiment toutes les communes" ont été itouchées, a constaté, dépitée, une source policière à l'AFP. De nombreux supermarchés ont été pillés, notamment à Montreuil et Epinay-sur-Seine. A Drancy, des émeutiers ont utilisé un camion pour forcer l'entrée d'un centre commercial qui a été en partie pillé et incendié, indique une autre source policière.

Comme la veille, les forces de l'ordre ont également été visées, tout comme des poubelles, des voitures et des bus ont été brûlés, notamment à Villeurbanne (Rhône), ont constaté des journalistes de l'AFP, ou à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). A nouveau, des bâtiments publics ont été pris pour cibles par des groupes, souvent encagoulés ou dissimulés sous des capuches, comme à la mairie du quartier prioritaire de l'Argon à Orléans. Le bureau de police situé au pôle Laherrère à Pau a par exemple été visé par un cocktail molotov, selon la préfecture des Pyrénées-Atlantiques.

A Lille (nord), la mairie d'un quartier populaire du sud de la ville a été incendiée et une autre, dans l'est de la ville, a été caillassée, selon la municipalité. Les brasiers se sont multipliés à Roubaix, sous les sirènes des pompiers et le projecteur d'un hélicoptère de la Gendarmerie.

Dans le centre-ville de Marseille, c'est la devanture de la bibliothèque municipale de l'Alcazar qui a été endommagée. A quelques encablures de là, sur le Vieux-Port, des échauffourées ont opposé les forces de l'ordre à un groupe de 100 à 150 personnes qui auraient tenté de monter des barricades.

Enfin, la cité Pablo Picasso à Nanterre, dont Nahel était originaire, a connu une troisième nuit de violences soutenues avec des voitures incendiées, des tirs de mortiers d'artifice et de grenades artisanales, a constaté une journaliste de l'AFP. Une agence bancaire du Crédit mutuel a aussi été incendiée.

Les émeutes de 2005, en pire ?

Depuis la mort de Nahel mardi, des écoles et des édifices publics ont été la cible de la colère de jeunes habitants des quartiers populaires et incendiés dans de multiples villes de France, rappelant les émeutes qui avaient embrasées la France en 2005 après la mort de deux adolescents poursuivis par la Police à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Selon les syndicats de Police, la situation serait même plus grave aujourd'hui, certains fonctionnaires évoquant une situation de violence inédite, comme ils n'en avaient jamais vécu.

Le drame à l'origine de l'embrasement actuel, s'est produit à proximité de la station de RER Nanterre-Préfecture, dans les Hauts-de-Seine, lors d'un contrôle de police sur la voiture conduite par Nahel, un mineur déjà connu pour des refus d'obtempérer. Le parquet considère que "les conditions légales d'usage de l'arme" par le policier auteur du tir "ne sont pas réunies", a déclaré jeudi matin le procureur de la République de Nanterre, Pascal Prache. Ce policier de 38 ans a été mis en examen pour "homicide volontaire" et placé en détention provisoire jeudi après-midi.

Une vidéo, authentifiée par l'AFP, a montré que ce motard de la Police nationale, positionné le long de la voiture interceptée, tenait Nahel en joue avec son arme de dotation, après une course-poursuite. Il a ensuite ouvert le feu, avec un tir à bout portant, lorsque la voiture redémarrait.

(Avec l'AFP)

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