<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> L’enquête exemplaire des gendarmes sur le crash du Rio-Paris en 2009

Photo : La longue enquête sur le cash du Rio-Paris en juin 2009 racontée devant le tribunal judiciaire de Paris à l'automne 2022. (Photo d'illustration / W.Tingey-Unsplash)

13 octobre 2022 | Opérationnel

Temps de lecture : 3 minutes

L’enquête exemplaire des gendarmes sur le crash du Rio-Paris en 2009

par | Opérationnel

"Il a fallu utiliser d'autres méthodes de travail", dit à la barre le colonel Xavier Mulot, aujourd'hui à la retraite, qui commandait la section de recherches de la Gendarmerie des transports aériens (GTA) en 2009. Car pendant près de deux ans et la découverte de l'épave puis des boites noires de l'appareil début mai 2011, les investigations ont du être menées sur un "appareil fantôme" par la cellule d'enquête "AF447".

Celle-ci a regroupé une quarantaine d'enquêteurs, ayant tous une compétence en accidentologie aérienne, divisés en six groupes, dont le premier a notamment participé à l'identification des corps, a expliqué le colonel Mulot. Cinquante corps ayant été repêchés peu après le crash et 103 autres deux ans plus tard, avec l'épave, dans des "conditions très difficiles", a rappelé l'ancien gendarme qui, très ému, a marqué un long silence. "D'abord, parce qu'il a fallu faire des choix. Nous étions contraints aussi par la volonté de certaines familles de ne pas remonter les corps de leurs défunts et nous n'avons pu remonter que les corps attachés à leurs sièges", a-t-il poursuivi.

Le "rôle déterminant" des sondes Pitot

En l'absence des deux boîtes noires qui enregistrent les paramètres techniques du vol et les conversations à l'intérieur du cockpit, des enquêteurs ont travaillé sur les messages ACARS (Aircraft communication addressing and reporting system), des informations transmises automatiquement par l'avion à Air France avant l'accident, a expliqué le colonel Mulot.

"Très rapidement", il est apparu que les sondes Pitot, chargées de délivrer la vitesse de l'avion à l'équipage, avaient eu "un rôle déterminant dans l'accident". Obstruées par des cristaux de glace, ces sondes ont cessé de fonctionner, désorientant donc les pilotes. L'avion a décroché et s'est abîmé 4 minutes 30 plus tard.

Cet Airbus A330 était équipé depuis sa mise en service en 2005 des mêmes sondes "AA" du fabriquant français Thalès, et deux autres modèles existaient, a souligné le directeur d'enquête. Les gendarmes ont relevé qu'au total, 17 incidents concernant ces sondes "AA" avaient été enregistrés entre janvier 2007 et juin 2009. Des pannes dont avaient connaissance Airbus et Air France qui ont organisé des réunions sur le sujet en 2008, menant à une campagne d'information par des bulletins placés dans les casiers des équipages.

"Mais nous n'avons pas eu la garantie que tous les pilotes en avaient eu connaissance", selon le colonel Mulot. Air France avait par ailleurs décidé de changer de modèle de sondes pour un autre baptisé "BA" à partir de 2007, mais "uniquement en cas de panne". "Ce que nous avons observé, c'est que Air Caraïbes n'a pas attendu de consigne (de l'Agence européenne de sécurité aérienne) pour changer les sondes, cette seconde compagnie considérant que l'autre modèle était plus résistant au givre", a-t-il précisé.

Les pistes "farfelues"

Un autre groupe d'enquêteurs a analysé puis écarté les pistes d'un "acte de malveillance", dont "certaines un peu plus farfelues que d'autres", a dit par ailleurs le directeur d'enquête Mulot, citant "la présence d'extraterrestres", "la cible terroriste visant un passager" ou "un attentat fomenté par un groupuscule extrémiste brésilien".

Les profils des trois pilotes, dont les "observations" étaient "très satisfaisantes", ont aussi été creusés. Les gendarmes ont constaté par ailleurs que "tous les avions qui ont précédé ou suivi l'AF447 ce soir-là ont procédé à un évitement" du Front inter tropical (FIT), zone météo particulièrement dangereuse dans laquelle l'avion a décroché.

Estimant qu'Airbus et Air France avaient fait preuve de "transparence", le colonel Mulot, également directeur d'enquête sur l'accident du Concorde en 2000, a jugé qu'il s'agissait du "plus difficile" dossier qu'il ait "eu à traiter, d'abord parce que faute de découverte de l'avion dès les premiers instants, il a fallu utiliser d'autres méthodes de travail". Il a ajouté: "Il a fallu attendre la découverte des enregistreurs de vol pour valider chacune des hypothèses que nous avions émises".

(avec AFP)

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