Des affrontements entre forces de l’ordre et manifestants du collectif Pou Lagwiyann dékolé (Pour que la Guyane décolle) ont terni, dans la nuit de jeudi à vendredi le premier jour de la visite d’Emmanuel Macron en Guyane. Un premier bilan fait état d’un gendarme mobile et d’un policier légèrement blessés.
Au retour à Cayenne du chef de l’état en fin de journée, des affrontements se sont déroulés entre forces de l’ordre et manifestants. Cinq personnes ont été interpellées, a indiqué dans la nuit le procureur Eric Vaillant. Un gendarme mobile et un policier ont été légèrement blessés, selon un premier bilan.
Pendant plusieurs heures, les forces de l’ordre ont tiré des gaz lacrymogènes destinés au départ à disperser un rassemblement devant la préfecture de Guyane.
En réponse, des jeunes souvent cagoulés ont lancé des cocktails Molotov et des projectiles, notamment aux abords du commissariat, près de la célèbre place des Palmistes. Des poubelles ont notamment pris feu.
Le chef de l’Etat était arrivé jeudi à la mi-journée (heure locale) dans un climat tendu, six mois après un mouvement social qui a paralysé ce territoire français en Amérique du Sud. Dès son arrivée, il s’est rendu à Maripasoula (sud-ouest, à la frontière fluviale du Surinam), la plus vaste commune de France, soumise à une très forte pression migratoire.
Il a averti qu’il n’était pas venu en “Père Noël”, ni pour “faire des promesses”.
“L’Etat a fait trop de promesses qui n’ont pas été tenues. Donc je suis là pour dire les choses en vérité telles que je les vois, prendre des engagements que je saurai tenir durant mon quinquennat, et aussi assurer les éléments d’autorité indispensables sur ce territoire“, a déclaré M. Macron, très entouré pendant tout son déplacement par de nombreux enfants qui lui ont demandé des selfies par dizaines.
Face à une population porteuse de grandes attentes pour le désenclavement de leur commune, et par une très forte chaleur, le président s’est efforcé de répondre à toute les questions, sur l’orpaillage, la demande d’un futur lycée, d’un hôpital, ou encore d’une route jusqu’à Cayenne.
Contraste
Les affrontements survenus en fin de journée ont contrasté avec le début de la visite présidentielle. L’après-midi, une marche à l’appel du collectif Pou Lagwiyann Dékolé avait ainsi rassemblé dans le calme plus d’un millier de personnes. Les manifestants demandaient le respect des accords signés avec l’ancien gouvernement à l’issue du mouvement social de mars-avril.
Réclamant un rendez-vous avec le chef de l’Etat, les manifestants se sont ensuite rassemblés devant la préfecture où ils ont écarté une première série de barrières pour se rapprocher du bâtiment. L’Elysée leur a proposé un rendez-vous vendredi matin mais les manifestants ont refusé, réclamant de voir Emmanuel Macron dans la soirée.
C’est ensuite que les événements se sont durcis. “Ils ont créé eux-mêmes le désordre public, c’est ça la réponse de l’Etat“, a dit un enseignant depuis 19 ans en Guyane. “Maintenant on sait à qui on a à faire“, a déclaré Davy Rimane, membre du collectif. Emmanuel Macron “n’a aucun respect pour nous“.
Il s’agit du premier voyage outre-mer du chef de l’Etat depuis son élection, hormis son déplacement en urgence aux Antilles à la mi-septembre après l’ouragan Irma.
Selon l’Elysée, Emmanuel Macron est venu dire qu’il respecterait l’accord de Guyane du 21 avril, par lequel l’ancien gouvernement
a acté un plan d’urgence de 1,08 milliard d’euros, signé des accords sectoriels et “pris acte” d’une demande de 2,1 mds d’euros de mesures supplémentaires.
Les Grands frères (émanation du mouvement des 500 frères très actif lors du mouvement) ont demandé jeudi aux commerçants de Cayenne et aux administrations de fermer leurs portes pour une opération ville morte durant la visite présidentielle. Une nouvelle manifestation est prévue vendredi matin.
Pression migratoire et centre spatial
A 7.000 km de Paris, le territoire de 83.000 km2 pour environ 254.000 habitants, cumule difficultés et retards: immigration clandestine massive, insécurité croissante, communes enclavées, services de santé défaillants, système scolaire inadapté, taux de chômage très élevé (23%).
Pour son déplacement, Emmanuel Macron est notamment accompagné du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et de plusieurs ministres. Vendredi, il est attendu au centre spatial de Kourou, vitrine de l’économie guyanaise, symbole d’inégalités sociales alors que d’autres communes n’ont ni électricité ni eau courante.
AFP