Les gendarmes de la section de recherches (SR) de Nantes n'ont jamais lâché l'affaire. Deux mois et demi après sa disparition, le corps de Karine Esquivillon a été retrouvé dans la nuit de jeudi 15 à vendredi 16 juin 2023, sur les indications de son mari qui est passé aux aveux. Un dénouement qui rappelle une autre affaire, celle de la disparition d'Alexia Daval, il y a plus de cinq ans, et élucidée grâce à la ténacité des gendarmes de la SR de Besançon.
Dans ces deux affaires, marquées par des enquêtes de même durée (deux à trois mois), on relève les mêmes données: la disparition d'une femme, un mari qui pleure sa disparition (y compris dans les médias), des enquêteurs gendarmes face aux déclarations contradictoires du mari et qui recueillent méthodiquement indices matériels et déclarations de voisins, avant que le mari suspect ne finisse par lâcher au cours d'une garde à vue.
Le mari de Karine Esquivillon, une mère de famille vendéenne dont on était sans nouvelles depuis deux mois et demi, est donc passé aux aveux dans la nuit de jeudi à vendredi, désignant aux enquêteurs de la SR de Nantes la localisation du corps de son épouse retrouvé peu après dans un bois. "Je confirme que Michel Pialle a reconnu" les faits et "indiqué aux enquêteurs où se trouve le corps", a précisé à la presse la procureure de la République de La Roche-sur-Yon Emmanuelle Lepissier.
48 heures de garde à vue
À la fin de sa garde à vue de 48 heures, Michel Pialle a reconnu devant les enquêteurs avoir tué son épouse accidentellement en manipulant une arme. Le corps de Karine Esquivillon a été retrouvé dans un bois isolé, à Gordeau, à quelques kilomètres du domicile vendéen du couple. Le corps de la victime va être autopsié pour vérifier, notamment, si les déclarations du mari correspondant avec les constatations du médecin-légiste.
Karine Esquivillon, 54 ans et mère de cinq enfants, avait disparu le 27 mars, sans laisser d'autre trace connue qu'un téléphone mobile, découvert deux semaines plus tard, le 9 avril, dans un fossé par le maire de la commune. L'appareil était encore chargé mais dépourvu de carte SIM, avait expliqué un peu plus tard le maire à l'AFP. Une photo d'une fille de la famille, découverte glissée dans l'étui au dos du téléphone, avait permis à l'édile de faire le lien avec Karine Esquivillon, dont il ignorait à l'époque la disparition. Un appel à témoins avait été lancé le 9 mai pour tenter de la retrouver.
Fin mai, son mari se disait convaincu que son épouse avait quitté "volontairement" leur domicile de Maché (Vendée), ce dont doutaient certains enfants et la soeur de la quinquagénaire. Cet ancien architecte, qui vend des objets d'art en ligne, assurait alors que son épouse avait profité de son absence pour partir. Il avait témoigné en mai, auprès de l'AFP, de son "inquiétude qui est plus forte chaque jour qui passe".
Michel Pialle a été arrêté mercredi 14 juin, vers 08h30, à son domicile de Maché et placé en garde à vue à La Roche-sur-Yon. L'enquête, ouverte le 17 avril pour "enlèvement et séquestration", avait été récemment élargie à des faits de meurtre. Une mesure procédurale qui permet d'élargir le champ des investigations.
L'homme s'explique et parle d'un "accident"
En début de garde à vue, la maison familiale, dans un hameau proche de Maché, avait été perquisitionnée pendant plus de huit heures en présence de Michel Pialle. Deux véhicules appartenant au couple ont notamment été saisis et transportés sur un camion afin d'être examinés par des gendarmes spécialisés. Depuis, selon Ouest-France, "des traces de sang [auraient] été retrouvées dans l’un des véhicules". La garde à vue de Michel Pialle a pris fin en début de matinée. Le quinquagénaire a été transféré vers 08h30 au palais de justice de La-Roche sur-Yon, où il a été mis en examen pour "meurtre sur conjoint" puis écroué, comme l'a confirmé son avocat Me Antoine Ory. "Il a décidé de s'expliquer, ajoute son défenseur. Il a donné sa version consistant à expliquer que c'est un accident."
Le nombre de féminicides a augmenté de 20% en France en 2021 par rapport à 2020, avec 122 femmes tuées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, selon les derniers chiffres disponibles du ministère de l'Intérieur.
PMG (avec AFP)
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