Hiver prématuré : des avalanches ont déjà fait trois victimes parmi les randonneurs ; les secouristes de la gendarmerie dauphinoise sont à pied d’œuvre. La saison blanche a mal commencé, très mal commencé. Trois morts le même jour. Le 2 décembre. Un samedi. Dans le même massif. Celui de la Chartreuse, à cheval sur l’Isère et la Savoie.
Fabrice Bouttaz montait, tout seul, vers la Dent de Crolles lorsqu’il a été emporté par une plaque à vent, ce phénomène qui fait qu’une couche de neige, à cause du vent et du froid, n’ayant pas “collé” à la couche inférieure, glisse sur elle sous le poids d’un randonneur. Le Grenoblois a ainsi dévalé la pente et fini sa course tragique contre une barre rocheuse.
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Au même moment, côté Savoie, deux professeurs du lycée Marlioz d’Aix-les-Bains, qui progressaient vers le Petit-Som, entre le pas du Loup et le col de Leschaux, sont emportés par une avalanche. Ils meurent sans témoin. Ce n’est que le lendemain que d’autres randonneurs, voyant la coulée, actionnent à tout hasard, et sans conviction, leur détecteur de victime d’avalanche. Stupeur : un émetteur répond ! Alerte. Opération de secours.
Lundi, en apprenant le double drame, c’est tout un lycée qui va éclater en sanglots. Jean-Luc Cheynel, professeur d’histoire-géo, et Olivier Justin, professeurs de philo, étaient adorés. Prémonition ? Selon ses élèves, pour son dernier cours, Olivier, qui pensait déjà, c’est sûr, à sa sortie en Chartreuse, avait écrit au tableau cette pensée de Pascal : “Nous perdons la vie avec joie, pourvu qu’on en parle”.
Alors on en parle…
Du tableau noir aux pistes blanches
Trois morts déjà chez les randonneurs ! On en avait comptés 31 durant la saison précédente, 21 en 2015-2016 et 45 en 214-2015, selon les statistiques dont dispose Dominique Létang, directeur de l’Association nationale pour l’étude de la neige et des avalanches (ANENA) et ancien du PGHM de l’Isère.
Parce que la randonnée à ski, hors des pistes balisées, est une activité dangereuse et parce que cette année les conditions climatiques sont particulièrement défavorables, du moins en ce début d’hiver prématuré, les secouristes de la Gendarmerie se sont préparés au pire.
Prévu de longue date, un entraînement en conditions réelles s’est déroulé sur le glacier des Deux-Alpes en Isère, sous la direction du commandant Patrick Poirot, commandant le peloton de gendarmerie de haute-montagne de l’Isère.
Soixante militaires du PGHM, des groupes montagne de l’Isère et de la Drôme ainsi que du peloton montagne de l’escadron de gendarmerie mobile de Grenoble, ont d’abord révisé “les fondamentaux” : comment sonder une avalanche, comment dégager une victime, comment prodiguer les premiers soins en attendant un médecin, comment évacuer une victime.
Le lendemain, branle-bas de combat : tout le monde sur la neige du glacier, altitude 3200 mètres, pour mettre en musique les partitions de la veille.
Aucun des secouristes ne connaît le scénario. Au début on cherche une victime. A la fin on en a trouvé quatre !
Procédure multivictimes et cellule de crise
Il faut alors engager une procédure “multivictimes” et alerter le SAMU 38 qui va mettre en place une cellule de crise. Dans cette zone doublement blanche, un relais radio portable du réseau de la gendarmerie a été mis en place, dès le début de cet exercice de simulation d’avalanche, pour que le “chantier”, situé à 3200 m, et le PCO des Deux-Alpes restent en contact.
Les gendarmes de la brigade des Deux-Alpes et ceux de la brigade des recherches de Grenoble, informent le Parquet et démarrent une enquête. Les conditions météo ne sont pas bonnes. Il ne faut pas compter sur l’hélicoptère ; ça tombe bien : le directeur de l’exercice va pouvoir insister sur les précautions à prendre lors de déplacements en montagne.
Cette mise en condition d’avant hiver, qualifiée de très positive par le patron du secours en montagne de la gendarmerie dauphinoise, a été organisée en liaison avec les pisteurs-secouristes de la station, l’office du tourisme et la municipalité des Deux-Alpes.
André Veyret
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