Un policier peut-il témoigner anonymement devant un tribunal alors qu’il a dans le même temps accordé des interviews à la presse ? Cette question a été posée, ce mercredi 4 octobre, lors du procès du frère de Mohamed Merah. Des avocats ont en effet souhaité que le bénéfice de l’anonymisation d’un témoignage pour raison de sécurité ne soit plus accordé aux policiers qui se sont exprimés sur l’affaire dans les médias.
Parmi les nombreux policiers appelés à témoigner devant la cour d’assises de Paris de l’enquête sur les tueries de Mohamed Merah à Toulouse et Montauban, seul l’un d’entre eux, le commissaire Eric Voulleminot, numéro deux de la Direction centrale de la police judiciaire, a accepté de témoigner à visage découvert.
Tous ses collègues ont obtenu de la cour de pouvoir s’exprimer anonymement en invoquant des raisons de sécurité. Ainsi, mercredi, deux policiers de la police judiciaire toulousaine, présentés dans le calendrier des débats sous l’intitulé: témoins n° 30 et 35, se sont exprimés par vidéotransmission, voix déformée, silhouettes en contre-jour.
Interrogé par Me Olivier Morice, avocat de la partie civile, le second policier a reconnu avoir accordé un entretien à un quotidien du sud-ouest à l’occasion de la commémoration des cinq ans des assassinats de Toulouse et Montauban.
Il a justifié sa demande par peur des représailles sur sa famille et ses enfants qui travaillent, comme lui, à Toulouse et sa région, « connue pour être un bassin de la radicalisation islamiste ». « C’est du cinéma », lui a lancé Me Eric Dupond-Moretti en dénonçant le climat sécuritaire créé par l’abus de cette disposition légale.
« Vous vous moquez du monde, le policier de ce matin a déjà donné une soixantaine d’interviews. Quand il s’agit de venir témoigner devant la cour il n’y a personne mais pas pour faire le beau devant la presse… », a-t-il lancé.
Les deux avocats, approuvés par leurs confrères, ont demandé en conséquence au président d’obliger toute personne ayant participé à un débat médiatique à venir témoigner, à l’exception bien sûr des policiers protégés par la loi, comme ceux des unités d’intervention du RAID.
« A l’heure actuelle, seuls des policiers ont été attaqués par des jihadistes, pas des avocats », a réagi l’un des deux policiers anonymisés provoquant des réactions outragées de la défense. « Il est clair que si j’avais été informé de ces interviews, ma décision aurait été différente », a souligné le président Franck Zientara.
(Avec AFP).
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