L’un pousse pour une législation renforcée sur les détecteurs de métaux et sur la pratique de leurs usagers. L’autre entend faire reconnaître la détection de métaux comme un loisir et permettre aux gens de déclarer leurs découvertes. Cette semaine, les points de vue contradictoires d’un gendarme et d’un ancien gendarme se sont exprimés sur le site de l’hebdomadaire Le Point. Sujet explosif si l’on en juge par la tonalité des échanges ! Il faut dire que, selon l’association "Halte au pillage du patrimoine archéologique et historique" (HAPPAH), près de 520.000 pièces de mobilier archéologique seraient dérobées par des "pilleurs" chaque année.
Simples amateurs ou véritables contrebandiers ?
Alexandre Dumont-Castells, 49 ans, est référent "archéologie" de la gendarmerie en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Ce maréchal des logis vient de soutenir une thèse de doctorat sur le Pillage du patrimoine archéologique terrestre en France métropolitaine à l’université d'Aix-en-Provence. Il rappelle qu'en France, la règlementation n’interdit pas l’utilisation de détecteurs de métaux et les fouilles par des amateurs, mais qu'elle les encadre strictement, soumettant son usage à différentes autorisations (propriétaires des sols, préfets, code du patrimoine).
Ainsi, creuser les sols sans y être autorisé vous expose à une amende délictuelle. Et ce, même en bord de plage ! "Des prospecteurs souvent clandestins se retrouvent régulièrement devant les tribunaux, pour ne pas avoir suivi ces règles", regrette Alexandre Dumont-Castell. En outre, le pillage archéologique est – théoriquement – sévèrement puni par la loi. En France, le fait d’utiliser un détecteur de métaux en vue d’effectuer une recherche archéologique expose à une contravention de 1.500 euros. De même, la "non-déclaration" d’une fouille est sanctionnée par une amende de 3.750 euros. Dégrader ou détruire l'environnement pour une fouille illégale est par ailleurs sanctionné par sept ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende. Mais de qui parle-ton ? De simples amateurs du dimanche ou de véritables contrebandiers participant à une activité tout ce qu'il y a de plus illégale ? C'est là le noeud du problème….
"Nous cherchons juste à pratiquer un loisir de plein air"
Pour Alexandre Dumont-Castells, la question de "la détection dite de loisir", qui revient souvent devant le Parlement, n’a ainsi aucune consistance juridique. On est dans les clous ou pas ! Il insiste donc pour une répression accrue, car "les sanctions demeurent généralement assez modestes en France". Et de regretter que, mises à part quelques structures, les associations d'usagers ferment les yeux sur les contraventions à la loi de certains de leurs membres qui, en outre, portent atteinte au patrimoine…
Une rhétorique qui a fortement déplu au second, l'ancien major de gendarmerie Marc Méreaux, président de la Fédération française des utilisateurs de détecteurs de métaux (FFDM). Interrogé quelques jours après, toujours sur le site du Point, ce dernier rejette l'étiquette d'"archéologue amateur" que, selon lui, les contempteurs des usagers de détecteurs de métaux veulent leur accoler. "Nous n’avons pas cette prétention. Nous cherchons juste à pratiquer un loisir de plein air. Nos membres connaissent la réglementation et ne ciblent pas les zones archéologiques", promet-il. Il conteste ainsi le terme de fouilles pour des "trous de 15 cm de profondeur". Cet ancien officier de police judiciaire au sein de la Gendarmerie, insiste sur le fait que le droit français ne prohibe nullement l’utilisation des détecteurs de métaux, mais conditionne les recherches à des fins archéologiques à l’obtention d’une autorisation administrative. Deux activités bien différentes…
Côté propositions, Marc Méreaux réclame une révision de la législation qui oblige les usagers de détecteurs de métaux à déclarer toute découverte archéologique. Une déclaration qui les condamne en même temps à une lourde amende… A l'image de ce qui se passe au Pays Bas et en Grande-Bretagne où, depuis 1998, plus de 1,5 million d’objets archéologiques ont été déclarés sur le registre appelé Portable Antiquities Scheme (PAS), il plaide pour la constitution d'un répertoire consultable par tous. Et surtout, qu'on arrête d'assimiler les "détectoristes" à des "pilleurs" archéologiques !
Si le chiffre est difficile à quantifier, les "détectoristes" seraient plus de 100.000 dans l’Hexagone à s’adonner à leur passion pour le "poêle à frire"…
Pour en savoir plus : lire les entretiens au Point de Alexandre Dumont-Castells et de Marc Méreaux