Cette audition d’un témoin devait clarifier les choses dans l’affaire Traoré. À l’issue, pourtant, la situation et toujours aussi confuse, sinon plus. Les avocats des deux parties ont en effet livré à la presse deux visions radicalement opposées des déclarations d’un homme chez qui Adama Traoré s’était réfugié le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise (Val-d’Oise) pour fuir les gendarmes.
Déjà entendu par les enquêteurs de la Gendarmerie, ce témoin avait alors affirmé qu’il avait trouvé Adama Traoré devant sa porte. “La seule chose qu’il me dit, c’est: “tire-moi”. Je ne l’ai jamais vu dans un état pareil. Il n’arrivait pas à parler. Il respirait bruyamment”, avait-il notamment déclaré à l’époque. C’est en partie sur la foi de ses déclarations que l’expertise médicale avait conclu que le jeune homme était en détresse respiratoire. Et ce, avant son interpellation par les gendarmes.
Le témoin s’est “rétracté” pour l’avocat des parties civiles
Ce jeudi 2 juillet, les trois juges d’instruction en charge de l’affaire l’ont entendu pendant quatre heures. À l’issue, la surprise a été forte parmi les journalistes qui attendaient les déclarations des avocats. Premier à s’exprimer, l’avocat des parties civiles Me Yassine Bouzrou a en effet expliqué que le témoin s’était “rétracté”.
“Il a affirmé que les éléments contenus dans son procès-verbal d’audition étaient faux (et qu’Adama Traoré) ne souffrait pas de détresse respiratoire, ne respirait pas bruyamment avant l’interpellation”, a précisé l’avocat.
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Quelques instants plus tard, autre son de cloche, pourtant, de la part de Me Rodolphe Bosselut, avocat des gendarmes avec Me Sandra Chirac-Kollarik: “Ce témoin a conforté la version qui avait été la sienne précédemment, et notamment sur un élément extrêmement important qui est l’état d’épuisement dans lequel Adama Traoré arrive à son domicile, en ayant même indiqué aujourd’hui qu’Adama Traoré lui aurait dit, avant que les gendarmes n’interviennent et ne l’interpellent, la phrase suivante: “Je vais mourir”.“
“Émotion médiatique au détriment de la vérité judiciaire”
Dans un communiqué signé avec leur confrère Me Pascal Rouiller, les deux avocats ont ensuite ajouté une précision. “Le témoin a confirmé la brièveté des opérations d’interpellation, les évaluant de manière certaine à deux minutes au maximum”, écrivent-ils.
Selon eux, “il est temps de mettre un terme à ce dossier que les parties civiles maintiennent artificiellement dans l’unique but d’exploiter une émotion médiatique au détriment de la vérité judiciaire”. Ils annoncent qu’ils déposeront “dans les prochains jours une demande de clôture de l’instruction aboutissant à la mise hors de cause définitive des gendarmes”.
MG